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Lise Billon, Fanny Schmutz et Maud Vanpoulle au sommet du Cerro Torre

«Une vue depuis le sommet, devinez lequel ! » écrit Lise Billon sur ses réseaux. « La lune veille sur nous » raconte-t-elle. Lise et ses compagnes de cordée, Fanny Schmutz et Maud Vanpoulle, ont atteint le plus beau des sommets, avant de descendre sous une lune bienveillante et un ciel clair, avec pour gardien le Fitz Roy éclairé par l’astre de la nuit. Elles ont gravi le Cerro Torre, la plus belle, la plus fière aiguille des Andes.

Un immense bravo me vient à l’esprit. De la joie pure sans doute pour celles qui saison après saison ont apprivoisé les montagnes dures de Patagonie. Son climat et ses vents furieux. Son rocher doré. Saison après saison, pour se frotter, un jour, au plus majestueux des sommets, le Cerro Torre. Par deux fois, Lise Billon a essayé. Par deux fois, elle a dû renoncer. Cette saison 2024 a été la bonne, mais ce n’était pas gagné. Loin de là.

La nuit face au Fitz Roy ©Lise Billon

Bravache, le trio avait annoncé ses intentions en partant en Patagonie cette saison : gravir le Torre ! Avec ses 3145 mètres, le Cerro Torre n’est pas le plus haut mais sans doute l’une des montagnes les plus compliquées à gravir. Des longueurs engagées qui s’empilent jusqu’à son capuchon de givre, formé de glace sans consistance. Il faut surmonter les trois dernières longueurs du headwall : trois longueurs extrêmes, exposées, en sixième et septième degré, tout là-haut, depuis que deux américains ont rétabli la noblesse et l’engagement du Torre en brisant les spits posés par Cesare Maestri. Non, ce n’était pas gagné.

«La saison est compliquée ici. Le vent ne veut pas s’arrêter, et quand il s’arrête, les montagnes sont blanches de givre » écrivait Lise Billon le 17 février. « Maintenant nous sommes plus expérimentées, plus familières avec ce massif. Nos ambitions ont grandi. » Et Lise de plaisanter après avoir gravi une voie classique : «Je me serais sentie à l’agonie il y a dix ans, cela m’aurait paru dix fois plus difficile ! » La raison ? Ce que Lise appelle la Chalten routine : « marcher sans fin, grimper un peu, rentrer à la maison, boire une bière en terrasse, et danser tard dans la nuit »

Heureuses d’avoir poursuivi cette chimère, le Cerro Torre. Jusqu’à son ultime marche.

Il y a quelques mois, Lise Billon nous racontait à quel point elle aimait la Patagonie, retrouver la communauté des grimpeurs d’El Chalten. Mais pas seulement pour les sommets et les grimpeurs qui s’y pressent, comme elle, régulièrement. Elle s’interrogeait aussi sur leurs motivations. La dose de risque acceptable, sur ces sommets à la beauté dangereuse, voire fatale. Elle qui veut mettre l’aventure vécue devant le sommet à tout prix. Avec parfois ce renoncement, comme au K7 au Pakistan l’été dernier.

Toutes les trois femmes guides de haute montagne, Maud Vanpoulle, Fanny Schmutz et Lise Billon ne se prennent pas trop au sérieux et ont l’habitude de se marrer, en témoigne les selfies déjantés sur les routes et les relais patagons. Mais elles ont accumulé l’expérience qui fait toute la différence pour venir à bout du Filo Sureste (ex-voie du Compresseur) du Cerro Torre.

Je sais que les trois amies sont maintenant heureuses. D’avoir cru en elles. D’avoir une nouvelle fois poursuivi cette « chimère ». Je sais que ce rêve acompli, le Cerro Torre, va leur apporter une immense joie pendant des années. Bravo !

À lire prochainement : l’interview exclusive de Lise, Fanny et Maud !