Bien avant l’aube, nous avons repris notre marche parmi les blocs. A hauteur de la Verte, il a fallu descendre, aborder le glacier puis traverser. Il faisait encore nuit quand nous sommes arrivés au pied de la face et nous avons préféré attendre les premières lueurs du jour pour passer la rimaye. Assis sur nos sacs, nous ne parlions ni l’un ni l’autre. Je sentais le froid et le sommeil qui me gagnaient. Juste au-dessus des sommets, les étoiles brillaient d’un éclat anormal. Nous avons entendu une pierre qui roulait dans un couloir. Il ne gelait pas, le ciel était trop proche et nous commencions à nous demander si la journée serait aussi belle que nous l’avions espéré.
Quand les montagnes se sont construites au-dessus de nous et que le jour a libéré la surface blanche du glacier, nous nous sommes aperçus que nous étions trop à gauche, à l’aplomb de l’éperon nord-est. Nous avons rapidement gagné la rimaye de la face nord.
Là, quinze années avant nous, d’autres s’étaient arrêtés qui ne connaissaient rien de la face. Comme nous, ils avaient contemplé le large couloir qui l’entaille et, de chaque côté, les deux éperons rocheux qui s’amincissent vers le haut en fines arêtes. Les premières tentatives d’ascension du versant nord de la Verte s’étaient toutes déroulées sur l’éperon de droite: lui seul était praticable dans sa partie inférieure. Mais toutes les cordées se heurtèrent à une barrière de dalles et de surplombs qu’elles ne purent franchir. Ce fut
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