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Ski de rando en Isère : le col de la Lavey en traversée

Massif des Écrins

Col de la Lavey, descente versant ouest face à l'Olan ©Jocelyn Chavy

Avril est le mois le plus propice pour s’immiscer à skis au coeur du plus sauvage des massifs alpins, les Écrins. S’il n’en restait qu’un, ce pourrait être celui-là : le col de la Lavey, 3309 mètres, un passage très haut-perché entre deux vallées aussi longues que magistrales. Il ne vous reste qu’à choisir dans quel sens traverser ce très beau haut-lieu, puisqu’un col, c’est fait pour être franchi, pour aller de l’autre côté. Ce que nous avons fait en traversant du Vénéon, versant Est, à la Muande, versant Ouest. Un grand voyage à skis au centre des Écrins.

Soyons précis. Nous étions en février, et non pas en avril, quand nous avons effectué cette belle course. Partis plusieurs jours en format raid pour rejoindre une équipe de Robinsons bivouaquant au coeur du massif en hiver (lire notre récit de cette aventure), le col de la Lavey s’est avéré la porte de sortie la plus tentante, et ça tombait bien, on voulait une boucle au départ de la Bérarde.. et voir du pays. Le col de la Lavey est situé entre deux mondes : la vallée du Haut-Vénéon à l’Est, et le vallon de la Muande, où se trouve le refuge de la Lavey, à l’Est. Le point de départ sera donc Champhorent, hameau situé après St-Christophe-en-Oisans, pour une traversée Ouest-Est du col, ou la Bérarde, pour une traversée Est-Ouest – ce que nous avons fait. Autre possibilité : faire le col en aller-retour versant Ouest, ce qui est plus classique.

Mais la traversée du col, et sa dose d’inconnu, n’est-elle pas la promesse d’une aventure typique des Écrins ? Une aventure de deux jours, c’est court mais c’est déjà un autre monde, peu de traces, pas un chat, et beaucoup de questions à résoudre, de passages à trouver. L’essence même du ski alpinisme, et quand bien même les pentes restent raisonnables, les distances, elles, se font sentir !

Le long du Vénéon. © JC

Nuit au Plan du Carrelet ©JC

La voie Lactée, entre Ailefroide à gauche et Tête du Cheret à droite. © JC

Dès que la route est ouverte, la course est faisable à la journée au départ de la Bérarde. Il faudra prévoir l’auto-stop pour revenir en arrivant à Champhorent. Il est cependant plus raisonnable de dormir par exemple au refuge du Plan du Carrelet (non gardé), ou au centre Alpin de la Bérarde si cela est possible. Bien entendu pour une traversée Ouest-Est, le refuge de la Lavey est tout désigné pour couper un peu la grande journée du lendemain. 

Ne pas sous-estimer la distance de cette longue traversée. On voit du pays.

Monter à la Bérarde en février est déjà en soi une belle balade, selon l’option choisie. Reste qu’au départ de la Bérarde, il faut déjà remonter le long du Vénéon, un long faux plat jusqu’au Plan du Carrelet. Bivouac ou nuit dans le refuge du Carrelet, sous la face nord-ouest de l’Ailefroide qui s’embrase au soleil couchant. Les étoiles garnissent le ciel comme jamais et quelques heures plus tard, un départ très matinal est nécessaire pour remonter le vallon du Chardon. L’oeil se perd en direction du col du même nom, à main gauche, en haut du pas si sage glacier du Petit Chardon. Un autre très bel objectif, comme celui, pour les alpinistes ou skieurs téméraires, toujours main gauche, des pics du Vaccivier, où couloirs suspendus et goulottes mixtes s’alignent.

Voici le passage-clé pour ce versant Est du col de la Lavey : quitter le plat du glacier du Chardon pour remonter au mieux des pentes plus raides qui conduisent au glacier de l’Âne, sous la Pointe du Vallon des Étages. Une courte pente qui peut vite se transformer en moraine à moitié éboulée : crampons et piolet sont de mise. Il ne reste plus qu’à pousser les skis sous la face sud surchauffée de la Pointe du Vallon des Étages, et skis sur le sac, atteindre le col de la Lavey, la Barre des Écrins et l’Ailefroide dans le rétro. Éssoufflé et si possible pas trop carbonisé par les 1400 m de dénivelé, ou 1600 m (depuis la Bérarde). Bravo, vous êtes à l’un des plus beaux cols des Écrins !

Une fois passé le verrou au-dessus du glacier du Chardon, le soleil arrive. Barre des Écrins et Ailefroide dans le rétro.

Glacier du Chardon.

Sous l’oeil des pics du Vaccivier, versant Est du col de la Lavey © Jocelyn Chavy

Face sud de la Pointe du Vallon des Étages. Le col de la Lavey est le passage évident bien visible. © JC

Derniers mètres versant Est, skis sur le sac. © JC

Impossible de décrire la descente du col de la Lavey versant ouest. En majesté, l’Olan, et l’Aiguille d’Olan. C’est tout simplement du grand spectacle, qui dure des kilomètres. Commencez par des grandes courbes jusqu’au lac des Rouies. De là deux possibilités, main droite ou main gauche, cette option (sud-ouest) nous a paru meilleure, via Entre les Eaux. Une fois sur le plat du vallon de la Muande, naviguez au mieux pour ne pas pousser sur les bâtons, faire gaffe aux coulées du versant ouest (main droite) qui débaroulent de la Tête de l’Étret. La Muande n’en finit pas, remerciez les dieux d’avoir inventé le ski de rando.

Le refuge de la Lavey apparaît enfin à l’horizon, mais la journée n’est pas finie. Longue glissade rive gauche, mais le final est à prendre rive droite, le sentier par l’oratoire, le pont sur le Vénéon quitté le matin même. Les quasi 200 mètres de dénivelé de remontée à Champhorent achèvent les jambes. Mais le plaisir d’avoir traversé un beau morceau, un grand morceau des sauvages Écrins n’est pas prêt de s’effacer. 

Le plaisir d’avoir traversé un grand morceau des Écrins n’est pas prêt de s’effacer.

Depuis le col de la Lavey, l’Olan, 3564 m, à gauche © Jocelyn Chavy

Grand ski au-dessus du lac des Rouies © Jocelyn Chavy

Passage au refuge de la Lavey. ©JC

Bière méritée à la Cordée à St-Christophe, avec Arthur et Jérôme. ©JC

Sommet : Col de la Lavey, 3309 m., en traversée

Dénivelé : 1600 m. D+ environ avec bivouac ou nuit au Carrelet. 1800 m. D+ au départ de la Bérarde.

Horaire moyen : 6h

Point départ : La Bérarde (traversée Est-Ouest) ou Champhorent (traversée Ouest-Est)

Itinéraire : dans le sens Est-Ouest, depuis la Bérarde, remonter la vallée du Vénéon jusqu’au Plan du Carrelet. De là, traverser le Plan du Carrelet pour passer rive gauche, et remonter à droite (rive gauche) le début du vallon du Chardon. Vers 2500, voire 2600 mètres, quitter le faux plat du glacier pour monter à main droite en trouvant le meilleur passage dans les pentes Est qui mènent au passage de l’Âne sur IGN (en pointillés sur la carte mais pour monter au col de la Lavey on n’a pas besoin d’y aller). Pentes exposés, à 35/40°, crux de la montée : crampons conseillés, skis sur le sac. Attention à tenir l’horaire pour franchir ce passage avant l’arrivée du soleil, chutes de pierre possibles. Remonter le paisible glacier de l’Âne, puis par une pente un peu plus raide, skis sur le sac, atteindre le col de la Lavey.  

De la bonne neige souple sous les Rouies ©JC

Descente versant ouest : en la première partie de la descente pour atteindre le replat du lac des Rouies s’effectue main droite. Du replat du lac, deux options. La mieux enneigée est a priori celle au sud qui passe par Entre les Eaux. Suivre ensuite le long vallon de la Muande pour atteindre le refuge de la Lavey. De là, poursuivre le long de la Muande et passer rive droite de celle-ci à la fin, via l’oratoire, pour franchir le Vénéon (pont) et remonter à Champhorent. Stop ou navette pour récupérer le véhicule à la Bérarde.

Col de la Lavey, traversée Ouest-Est : l’avantage dans ce sens est de pouvoir bénéficier du refuge de la Lavey pour couper la montée, qui fera tout de même 1500 m de D+ au départ de la Lavey. L’inconvénient majeur est d’avoir un horaire très, très matinal pour pouvoir descendre versant Est en sécurité et franchir le verrou sous le Passage de l’Âne. Pour toutes ces raisons, il nous semble pertinent de recommander la traversée du col de la Lavey dans l’autre sens, Est-Ouest. Ou alors de faire le col versant Ouest en aller-retour. 

Conseils : crampons, piolet indispensables. Départ avant l’aube. Ne pas négliger les longues distances à effectuer.

 

Variante XL

Les Rouies 3589 m : très beau sommet qu’il est tentant d’ajouter à sa liste quand on vise le col de la Lavey. Possible en traversée sur le versant Gioberney.

Plus d’infos sur le ski de rando en Isère

N’oubliez pas de prendre la météo, et le bulletin d’estimation des risques d’avalanches, et le tryptique DVA-pelle-sonde. Matériel de sécurité sur glacier recommandé : corde, kit crevasse. Piolet et crampons indispensables.