19 juin 1964. Newport. Un inconnu remporte la Transat anglaise. Tabarly. Lui-même ne le sait pas jusqu’à ce qu’il passe le bateau-feu de Nantucket. Hormis quelques brèves dans The Observer, le monde ignorait tout de ses vingt-sept jours de mer. On faisait connaissance avec l’aventure lorsqu’elle rentrait à la maison. C’était comme ça au siècle dernier.
Pas besoin de si loin. Mai 2001. Une rumeur enfle dans les rues de Chamonix. Marco Siffredi aurait descendu en surf le couloir Norton à l’Everest. Intégralement. Incroyablement. On en sera sûr quelques jours plus tard. Et les images, elles rentreront quand il rentrera, il faudra attendre ; l’attente, cette humeur d’autrefois.
Aujourd’hui, on en sait beaucoup. Tout de suite. De la mer, des montagnes ou d’un autre lieu d’aventure, les images nous arrivent en masse, immédiates, arborescentes. On sait ce qu’a mangé Gabart à midi dans les Cinquantièmes Hurlants, on sait si Urubko est à deux ou trois cent mètres de sauver Revol au Nanga Parbat.
C’est comme ça, c’est la vie qui avance, son cul botté par le progrès. L’image diffuse aussi vite que la lumière. On ne jouera pas ici du c’était mieux avant, l’indécent refrain de ceux confortablement lovés dans leur modernité, à qui il suffirait d’une heure d’avion pour voir comme ailleurs, le temps a méchamment stagné ; qu’ils aillent jeter un œil, ils reviendront dare-dare, leur nostalgie entre les jambes. Non, c’était juste un autre temps, ce qui nous remue c’est comme il accélère.
C’était
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