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Ben Nevis : voyage dans le temple de l’alpinisme écossais

Le Ben Nevis attire les alpinistes à la recherche de belles lignes de glace et de rocher, mais aussi d’une ambiance unique. Météo rude et grisante, esthétique de lignes courtes mais techniques, légendes écossaises, embruns et vapeurs de whisky : il colle au Ben Nevis une image de montagne brute, presque mystique. Le commun des alpinistes y a pourtant sa place aussi. Décryptage et clés pour un pèlerinage réussi dans le temple du mixte, sans oublier un carnet pratique et une sélection de voies pour bien débuter au Ben.

Sous ses faux airs de colline pour randonneurs à seulement 1 344m, avec son unique face nord-est propice à l’alpinisme et des voies de 200m en moyenne, le Ben Nevis cache bien son jeu. Du moins sur le papier. Le prétentieux alpin reverra rapidement son jugement en approchant le point culminant des îles britanniques, situé au cœur des Highlands. Du refuge CIC, la majeure partie de la face convoitée se déploie aux yeux des prétendants. 

Entrée en matière sur le chemin tourbeux du Allt a Mhuilinn. ©Ulysse Lefebvre

Le refuge Charles Inglis Clark (CIC) appartenant au Scottish mountaineering club ©UL

Situé à quelques dizaines de kilomètres d’un océan qui remonte jusqu’à lui via le veinage de ses lochs, le Ben Nevis subit de plein fouet les perturbations atlantiques. Le temps y change plus rapidement encore que dans nos montagnes. Que ce soit la pluie qui le transforme en « black mountain » propice au dry tooling, ou les placages de neige qui en font un mets délicieux de mixte, le vieux Ben a toujours quelque chose à offrir au grimpeur dégourdi.

Attention toutefois à la neige durcie d’une approche apparemment débonnaire, qui en a laissé plus d’un sur le carreau. Quant aux petites avalanches de neige pulvérulente, les spindrifts, elles vous martèlent moins le ciboulot par leur force que par leur récurrence, leur lancinance. On en a même vu remonter les parois tant le vent était fort. Au Ben Nevis, mieux vaut composer avec les éléments, préférer la souplesse à la force. Ici, le proverbe dit : « Mieux vaut plier que casser ». Bienvenue en terre d’Ecosse.  

Dans la très abordable Ledge route, on passe du grand beau d’un blue bird day à la tempête de neige, en un claquement de doigts.  ©UL

Les descentes se font par différents « gullies » plus ou moins raides et accessibles. Ici le Number 4 Gully. ©UL

Traversée et premiers points de vue sur la muraille du Ben Nevis, depuis Tower Ridge. ©UL

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La glace en marches

Des effluves de tourbe et d’iode planent dans l’air surchauffé du refuge CIC hut (680 m), situé aux premières loges de la face nord-est du Ben Nevis. Ce soir, le whisky n’est pas un cliché pour touristes en mal de carte postale. Le bruit des verres qui trinquent au pub a cédé la place aux échanges plus discrets de bouteilles en plastique, amenées par les grimpeurs locaux. Ils savent mieux que personne combien descendre quelques centilitres de la dive boisson peut vous retanner le cuir après une rude journée dehors. 

Ce soir l’alpiniste à la peau dure. Zélé, il se frotte la couenne à la large palette des whiskys scottish et le son monte rapidement. Quelle voie aujourd’hui ? Quelles conditions ? La descente ? Les idées fusent pour le lendemain, les ambitions grandissent, sous le regard paternel de deux figures de l’alpinisme local (du scottish mountaineering devrait-on dire), dont les portraits ont été affichés au mur.

Celui de Robin Smith rappelle le « pinnacle » de l’alpinisme écossais comme il est nommé là-bas, un apogée dont le symbole le plus fort est concentré en une semaine d’ascensions audacieuses au Ben Nevis, par Smith et son compagnon de cordée Jimmy Marshall, en février 1960. En l’espace de huit jours, les deux prodiges écossais ouvrent des voies difficiles, en taillant des marches, comme il est d’usage à l’époque : Minus 3 gully (160m, IV,5), Pigott’s route (245m, V,6) ou encore Smith’s route (130m, V,5) et le magnifique Orion direct (420m, V,5).

A very serious place to be

Depuis Tower Ridge, vue sur un grimpeur dans une voie bien plus raide. ©UL

Tower Ridge est une bonne entrée en matière, avec des sections verticales et d’autres plus reposantes. ©UL

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Surtout, ils répètent le très fameux Point five gully (325m, V,5), célèbre depuis son ouverture sur fond de rivalités internes au milieu écossais. Au terme d’un siège mémorable des prétendants, sa première ascension fut réussie par I.S. Clough, D.Pipes, R. Shaw et J.M. Alexander en cinq jours de lutte, en janvier 1959. Smith et Marshall mettront une journée pour la première répétition.

Puis, lorsque les conditions ne permettent aucune escalade (et il faut qu’elles soient exécrables pour repousser deux gaillards comme Smith et Marshall) les deux compères s’en vont « pour une petite marche, avec beaucoup d’argent mais pas de carte ». Ce qui est en réalité une immense bambée sur crête les mène jusqu’à un pub de Fort William. La virée se termine par une arrestation, pour une sombre histoire de vol de dominos.

Après cette aventure sans conséquences graves, tant pour leur casier judiciaire que pour leur motivation, Marshall et Smith sont de retour au refuge vers minuit. Le lendemain et le surlendemain, bien que « quelque peu malades », ils ouvrent tout de même Pigott’s route puis Orion direct, tout diminués qu’ils sont. « A very serious place to be » conclura Smith à propos d’Orion direct. Cette petite virée résume bien l’esprit écossais : énergie, détermination et désaltération.

Face au Ben Nevis, les pentes douces du Carn Mor Dearg abritent le refuge CIC. ©UL

Portrait de Robin Smith accroché au mur du refuge CIC. ©UL

Le livre de courses, intéressant pour avoir un aperçu des conditions, sans Internet. ©UL

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Du métal sur le rocher

A défaut de randonner, leurs successeurs font évoluer leur technique de progression et compensent les périodes de glace maigre en ancrant les piolets dans les mottes d’herbe gelée (le turf) et en crochetant le rocher. Cette technique nouvelle apparaît dans les années 1970 avec des grimpeurs tels qu’Alan Kimber ou Robin Clothier qui mettent à profit l’arrivée du piolet Chouinard-Frost (1969) et le Terrodactyl (1971), developpé par Hamish MacInnes, à la courbure de lame plus prononcée mais au profil plus épais. Kimber : « La lame du Chouinard était plus effilée que celle du Terrodactyl mais plus droite. Alors souvent, on accentuait sa courbure en la chauffant ; parfois trop chaud, parfois trop froid, si bien que parfois elle pliait ou cassait en pleine voie ».

À Fort Williams, Alan Kimber resort les antiquités avec ses piolets Chouinard-Frost (1969) et le fameux Terrodactyl (1971). ©UL

Deux piolets modernes, dans la sortie de la combinaison Wendigo-Central Gully (branche de droite). ©UL

Entre neige, glace et givre. ©UL

Aux côtés du portrait de Smith, un article de journal punaisé au mur du refuge CIC annonce le décès de Godefroy Perroux en 2002 et rappelle ses états de fait au Ben Nevis, dernière preuve de la reconnaissance des Ecossais envers le chamoniard amoureux de cette montagne. Lui qui se considérait comme « un Sisyphe heureux », est revenu chaque année pendant plus de dix ans, défrichant de nouveaux itinéraires et attirant l’attention de la communauté alpine sur le potentiel du Ben Nevis.

La petite montagne devient alors le laboratoire du mixte moderne pour le monde de l’alpinisme, et ce plus encore à l’aube du XXIe siècle. Au menu : fins placements de monopointe sur lit de granite, crochetage de lame en fissure gelée et protections difficiles sur fins placages de neige, glace ou même givre, typique de l’Ecosse. La fissure parfaite de Darth Vader (100m, VII,7), ouverte en mars 1997 par Simon Richardson et Chris Cartwright est représentative de cette période charnière. Les secteurs de Creag Coire Na Ciste et Orion cristallisent la dynamique et voient de nouveaux itinéraires plus durs, plus engagés, plus mixtes encore rayer leurs faces. 

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Dave MacLeod et Andy Turner reprendront ensuite le flambeau de la haute difficulté (Don’t die of ignorance, XI, 11, 2008 ; Anubis, 2010, XII ; White Noise, XI, 12, 2013) qui sont tour à tour les voies les plus dures d’Ecosse. Jusqu’à ce qu’un grimpeur continental ne vienne parcourir l’une d’entre elles à toute vitesse, hymne nouveau du haut-niveau. En décembre 2007, Andy Turner ouvre à vue une ligne très difficile mais surtout très exposée, The Secret (70m, X, 10). C’est un tel événement que la nouvelle de son ouverture court sur le web avant même que Turner ne soit de retour dans la vallée. En 2010, la machine suisse Ueli Steck est de passage et réalise la seconde ascension de la voie (flash) en une trentaine de minutes et avec trois points d’assurage en tout et pour tout. Turner, beau joueur : « C’était vraiment impressionnant. Ça m’a fait beaucoup réfléchir».

L’histoire continue et le Ben Nevis fait désormais converger le monde de l’alpinisme dans son entier. Avec ses conditions particulières, il participe à l’évolution du mixte, non plus comme une simple étape d’entraînement vers de plus hautes cimes mais comme un lieu d’évolution à part entière, avec ses particularités, ses codes et son histoire. Tout cela heureusement accessible au commun des alpinistes. 

c’est un lieu d’évolution à part entière,
avec ses particularités, ses codes
et son histoire

Au-delà du Ben Nevis, les Munros (sommets de 3000 pieds et plus, soit 914 m) s’étendent à perte de vue. ©UL

Scottish spirit et tartan de chien

Alors pourquoi tant d’engouement pour le Ben Nevis ? Lui seul concentre tous les atouts d’une grande face alpine en offrant des conditions de neige et de glace variables mais la plupart du temps exploitables, qu’il s’agisse de glace de ruissellement (cascade) ou d’hiver (goulottes) et même sur rocher nu (dry tooling). Alors certes, une semaine de temps exécrable y est relativement fréquent. C’est même devenu la marque de fabrique de l’alpinisme au Ben Nevis. On serait presque déçus d’y grimper une semaine au soleil, sans rencontrer une fois au moins les spindrifts ou le brouillard typique au sommet. Et c’est bien là que l’esprit écossais entre en jeu. Alan Kimber : « En Ecosse, tu sors même par mauvais temps, sinon tu restes toujours à la maison ».

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Richard Bentley au pied du mur de Minus Face, vers l’attaque de Minus 2. ©UL

Cette motivation doublée d’une capacité d’adaptation s’explique aussi par le système éducatif « outdoor » en Ecosse. Si en France un organisme tel que l’UCPA met l’accent sur l’apprentissage des techniques alpines de ses jeunes participants, son équivalent écossais, le Scottish Outdoor Education Center, met quant à lui l’accent sur les connaissances variées en termes de survie en extérieur. « Cette orientation vient de l’histoire du Royaume-Uni qui a compté un grand nombre de morts parmi ses soldats de la seconde guerre mondiale, notamment ses marins, faute de connaissances suffisantes. Depuis, on insiste sur les capacités à s’adapter au milieu. On travaille plus sur le mental que sur la résistance physique des jeunes » explique Alan Kimber. Autant dire que la plupart des alpinistes écossais qui sont passés par ces centres de jeunesse ont en main toutes les cartes nécessaires pour affronter les conditions du Ben Nevis. 

 Pourquoi mettre des spits ?
Pour rabaisser la montagne à ton niveau ? 
Andy Turner

Richard Bentley à l’attaque de Minus 2… ©UL

…avant de diparaitre dans les spindrifts. ©UL

Plus qu’un fort niveau en escalade sur glace, l’alpiniste continental de passage sera mieux armé s’il possède une bonne habitude à la progression en terrain d’aventure, ainsi qu’une bonne polyvalence dans la maîtrise des techniques d’assurage. Il n’est pas rare d’utiliser tour à tour friends, excentriques, stoppers, broches et corps-mort dans une même voie. L’assurage sur deadman n’est pas fréquent dans les Alpes mais il ne faudra pas négliger cette technique au risque d’être décontenancé au sortir d’une voie, sur le plateau nu et neigeux du Ben Nevis. A l’image de l’escalade anglaise exclusivement sur coinceurs, l’alpinisme écossais ne pourrait supporter le moindre point d’assurage fixe. « Pourquoi mettre des spits ? Pour rabaisser la montagne à ton niveau ? » résume Andy Turner. 

le Ben Nevis impose
la concentration et le sang-froid

Richard dans le magnifique dièdre final du Forty Feet Corner (Minus 2). ©UL

Sans en arriver à la concentration extrême des grimpeurs british les plus engagés (vous avez dit headpointing ?), le Ben Nevis impose la concentration et le sang-froid. Habitué des lieux depuis plus de dix ans, le guide gravarot Paul Grobel résume les bienfaits psychologiques du Ben Nevis sur l’alpiniste : « L’apprentissage s’y fait dans des conditions difficiles. Cela impose un recentrement sur soi, en même temps qu’une conscience aigüe de l’environnement extérieur. Il en résulte une plus grande confiance en soi ».

Les verrous psychologiques sautent (le fantasme de l’alpinisme hivernal, froid et dur), l’adaptation se renforce face aux conditions difficiles (doucement mais surement) et le pragmatisme devient l’arme absolue face à la variété des techniques rencontrées. 

Face au fantasme intimidant de l’alpinisme hivernal, en un lieu chargé d’histoires épiques, menées de piolet ferme par les précurseurs du mixte moderne, l’alpiniste moyen n’aura pas à rougir. Les voies y sont de difficultés variées et même les plus abordables se déroulent dans une ambiance unique. 

Relais sur champignon de neige : un classique du Ben Nevis parfaitement maitrisé par Paulo Grobel. ©UL

Au sommet du Ben, les cordées sortent toutes sur le plateau, telles des petits soldats à l’assaut d’une forteresse. ©UL

Lochs et montagnes. Salty et peaty à la fois, pour amateurs de whisky. ©UL

Kilt de survie

Cotations : l’échelle de cotation écossaise est différente de l’échelle française. Difficile de trouver une règle de conversion toujours pertinente. En Ecosse par exemple, l’escalade sur coinceurs est la règle. L’engagement y est donc différemment perçu. Globalement, on peut retirer un degré ou un degré et demi aux cotations techniques (chiffre arabe) et d’engagement (chiffre romain) pour avoir une idée de la difficulté dans l’échelle française. Par soucis de clarté et d’homogénéité, toutes les cotations sont données ici dans l’échelle de cotation écossaise. 

Protection : tout pour le rocher, la glace et la neige. Stoppers, friends, mais aussi excentriques, plus efficaces que les friends dans les fissures gelées. Sans oublier un corps-mort pour les relais en neige, notamment au sommet du Ben Nevis. Broches de tailles variées, sans négliger les plus courtes, pour tout au plus limiter l’exposition sur la glace fine. Crochet pour Abalakov.

Matériel : piolets-traction, crampons pour la glace, éventuellement monopointe pour plus de précision. Un porte-corde de type Ring’o de Béal au relais est pratique pour éviter de la geler. 

Vêtements : un point clé, leur qualité est une condition sine qua non. Veste imperméable et coupe-vent avec capuche ajustable sur le casque, pantalon imperméable également et sous-pantalon chaud ; bonnet et même cagoule pour une bonne isolation de la tête ; lunettes de soleil mais aussi masque de ski pour la visibilité par chute de neige et vent ; plusieurs paires de gants (très chauds, chauds, plus fins et techniques…) voire deux paires de chaque type pour le roulement de séchage.

Whisky : impensable de monter au refuge CIC sans une bouteille, même petite, du breuvage national. Que les buveurs de boissons sans alcool se rassurent : one trouve en Ecosse un nombre incroyable de bières sans alcool… et même du whisky zéro. 

La « drying room » du refuge CIC, un espace chauffé rien que pour le matériel détrempé. ©UL

Carnet de route

Itinéraires

Voici une sélection d’itinéraires de difficulté et engagement modérés. De manière générale, on prendra garde aux approches et descentes, dans lesquelles le risque d’avalanche est souvent à prendre en compte. Les voies classiques y sont évidemment bien représentées. Elles sont idéales pour aborder le style de l’escalade au Ben Nevis, de manière progressive. On y compte plus de 300 itinéraires. La sélection qui suit est donc forcément subjective et très réductrice. 

Les cotations données sont à la norme écossaise, pour plus d’homogénéité (cf Encadré Kilt de survie). 

Ledge route (450m, II, 2) – Carn Dearg Buttress : itinéraire facile et rapidement faisable, en une demie journée. Peu raide, peu de glace, c’est néanmoins un itinéraire très esthétique pour prendre ses marques en douceur et repérer les lieux, notamment les voies de descente. Le plus beau dans cet ordre difficulté.

 

Tower Ridge (600m, IV, 3) – Tower Ridge : « L’une des plus belles ascensions du Ben Nevis » selon Godefroy Perroux. Longue arête menant au sommet. Difficulté modérée avec tout de même quelques passages techniques et/ou impressionnants (Eastern traverse ou The Gap par exemple). C’est une classique que l’on parcourt également en sortie des voies qui parcourent ses flancs, telle que la photogénique Glover Chimney (200m, III, 3). 

 

Combinaison Wendigo – Central Gully (120m, IV, 4) – Creag Coire Na Ciste : enchainement classique du début de Wendigo (ouvert par Tom Patey en 1963), plus intéressant que la pente de neige initiale de Central Gully, avec la deuxième partie de Central Gully right hand et sa belle cheminée finale, avant une pente de neige sous corniche, caractéristique des sorties au Ben Nevis. Courte voie pour se lancer dans des sections de glace plus raides. 

 

Green Gully (180m, IV, 4) – The Comb : le plus facile du trio de gullies classiques, avec Zero gully et Point Five gully. L’engagement et la difficulté y dépendent plus qu’ailleurs de la fréquentation. On y trouve souvent un escalier de marches. 

 

Zero Gully (300 m, V,4) – Orion Face : célèbre couloir ouvert par McInnes, Patey et Nicol en 1957 au terme d’un siège mémorable et de rivalités intestines. Le moins évident à protéger du trio de gullies classiques. Sa configuration de déversoir en fait un itinéraire à éviter après de fortes chutes de neige. 

 

Point Five Gully (325m, V,5) – Observatory Ridge : le classique des classiques. Belle ligne directe très fréquentée, dont les traces de passage (marches, ancrages) diminuent la difficulté et le plaisir. Le mètre-étalon du grade V,5 écossais au Ben Nevis, par rapport auquel sont côtés les autres itinéraires.

 

Minus 2 (275m, V, 5) – Minus Face : « the finest of the Nevis gullies » selon le Scottish Mountaineering Club. Autrement dit, le plus élégant couloir du Ben Nevis. Une ligne raide et directe qui permet de parcourir également North East Buttress (IV,5) pour la sortie. La section la plus technique de cette belle arête se situe en fin de parcours, avec le fameux passage mixte du Mantrap, au nom évocateur (littéralement « le piège à homme »), court mais intense, ainsi que le magnifique dièdre final du Forty Feet Corner. 

Smith’s Route (130m, V,5) – Gardyloo Buttress : l’un des chef d’œuvre de Smith et Marshall, ouvert durant leur semaine de février 1960. Court mais exposé, on se souviendra dès lors avec respect qu’ils la parcoururent en taillant des marches. 

Orion direct (420m, V,5) – Orion Face : ne pas se fier aux cotations identiques aux classiques précédentes. Orion direct est considéré comme l’un des itinéraires les plus alpins d’Ecosse. La lecture d’itinéraire et la difficulté soutenue sur les 420m d’ascension n’y sont pas pour rien. Godefroy Perroux la comparait à la face nord des Droites, en plus court. Superbe point d’orgue à un séjour de découverte, pour peux que l’on ait bien assimilé les caractéristiques du Ben Nevis. 

 

Descentes

Plusieurs couloirs permettent de descendre du plateau qu’est le sommet du Ben Nevis. On prendra soin d’emporter une carte du sommet, fournie dans tous les magasins de matériel d’alpinisme de Fort William ou dans les topos. De manière générale, points GPS et azimuts constituent le plus sûr moyen de trouver les voies de descente. 

On choisira selon la sortie de la voie parcourue et les conditions. Voilà les plus utiles : 

 

  • Number 4 Gully : Situé à l’ouest de la face.  Première partie raide et cornichée. A éviter par forte chute de neige. Le plus utilisé pour rentrer au refuge CIC. 
  • Carn Mor Dearg Arete : autrefois appelé Abseil posts en raison des balises qui en indiquait le chemin, aujourd’hui retirées. A l’extrême est de la face. Première partie de descente en pente douce versant est puis raide couloir en retour versant nord. Assez sûr par mauvais temps. 
  • Red Burn : difficile à trouver depuis le plateau par mauvais temps, cette descente reste la plus sûre et la plus facile. Coordonnées GPS à enregistrer impérativement au préalable. 

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Infos pratiques

Vers Fort William : Glasgow est le point de chute idéal. Des bus quotidiens relient Fort Williams (www.citylink.co.uk). Un peu plus long et plus cher, mais tellement plus agréable, le train est également un excellent moyen de rejoindre les Highlands en traversant des paysages magnifiques : www.scotrail.co.uk. Toutes les infos et horaires à jour sont également disponibles à l’office de tourisme situé dans l’aéroport. 

Vers le Ben Nevis, deux possibilités : 

  • Allt a Mhuilinn : de Fort William, prendre l’A82 vers Inverness (nord-est). Peu après le golf, prendre un chemin à droite qui mène au north face car park. De là, démarre le sentier Allt a Mhuilinn, bien balisé, qui n’était encore qu’une vague lande tourbeuse avant sa réfection complète en de 2002 à 2011. 2h jusqu’au refuge CIC.
  • Achintee house : itinéraire emprunté par les randonneurs pour atteindre le sommet. De Fort William, emprunter une courte section de l’A82 vers Inverness, avant de tourner à droite juste après avoir traversé un pont sur la Nevis River. Un petit chemin mène à l’Achintee house où l’on se gare. Un sentier d’abord raide mène à un premier col (620 m). Gauche pour la voie normale vers le sommet, gauche pour rejoindre un autre un petit col (600 m), au nord-ouest de The Castle, puis un chemin traversant sous ce même Castle et menant vers le refuge CIC. 2h30.

Période : février et mars sont les mois les plus propices. Les placages de neige et de glace y sont au rendez-vous. En décembre, neige et la glace ne sont pas encore suffisamment présents tandis qu’en janvier, de fortes précipitations peuvent apporter de grandes quantités de neige désagréables voire dangereuses dans les gullies.

Hébergement : L’un des points clé du séjour.
Beaucoup d’hébergements sont proposés à Fort William et permettent de débuter puis de finir le séjour confortablement. 

Une fois là haut, ça se complique. Le refuge CIC hut (680 m), rénové et agrandi en 2012, est le seul refuge alentour. Sur ses 26 places, huit sont réservées aux membres du Scottish Mountaineering club, propriétaire, de décembre à avril. Autant dire qu’il vaut mieux contacter assez tôt son gardien, Robin Clothier, ([email protected]) pour réserver. Même si M. Clothier, fort ouvreur au Ben dans les années 1980-90 gère plus le refuge à distance qu’il ne le garde au sens traditionnel du terme, la discipline y est impressionnante. Les alpinistes n’y séjournant pas ne sont pas autorisés à entrer au-delà du hall d’entrée. Cette règle est appliquée par tous et les quelques audacieux qui passent outre, se font gentiment rappeler à l’ordre par les occupants. Cela peut sembler strict voire rude mais c’est un bon moyen d’éviter la cohue dans l’espace retreint du refuge. Comme le gardien n’est pas sur place, le refuge fonctionne réellement comme une location classique gère son séjour et son utilisation du refuge. Le poêle à bois y est presque trop efficace, des plaques chauffantes au gaz permettent de cuisiner confortablement et une éolienne assure un minimum d’électricité pour le petit matériel, quand il y a du vent bien sûr. 

Sans réservation, il faudra camper aux abords du refuge pour bénéficier de la source ou marcher environ 3h aller/retour chaque jour pour rallier la vallée au Ben Nevis.

Encadrement : Sur place, on ne peut que conseiller de contacter directement le guide Richard Bentley, installé à Fort William depuis près de 15 ans et fort défricheur au Ben Nevis : www.mountainmotion.co.uk. De même, Alan Kimber, figure du « scottish mountaineering » dans les années 1970-1980 possède une petite agence de tourisme. C’est toujours passionnant de l’écouter parler de l’histoire du Ben Nevis : www.westcoast-mountainguides.co.uk

D’autres agences à Fort William proposent les services de plusieurs guides : www.westcoast-mountainguides.co.uk ; www.highland-mountain-guides.co.uk

Topos : Ben Nevis, neige, glace et mixte. Les plus belles voies, Godefroy Perroux. Scottish winter climbs, Andy Nisbet, Rab Anderson, Simon Richardson. Ben Nevis, Rock and ice climbs, Simon Richardson. Winter climbs, Ben Nevis and Glen Coe, Mike Pescod. Le plus complet pour ce qui concerne l’historique des ouvertures.

Bibliographie : Ben Nevis, Britain’s highest mountain, Ken Crocket et Simon Richardson. High Endeavours, the life and legend of Robin Smith, Jimmy Cruickshank (en anglais). The Pinnacle, film de Dave MacLeod et Andy Turner, partis sur les traces de Robin Smith et Jimmy Marshall pour le cinquantenaire de leur semaine mémorable au Ben Nevis. 

Webographie : Scottish Mountaineering Club : www.smc.org.uk ; le site de Simon Richardson : www.scottishwinter.com ; le site de Paulo Grobel, avec sa foule de détails pratiques : www.paulo-grobel.com, le site de l’impressionnant musée du matériel d’alpinisme, par Mike Tighe, situé à Glen Roy. Moteur de recherche en ligne pour trouver des infos sur une foule d’objets, du piolet au réchaud: www.smhc.co.uk. 

Cartes : Ordnance Survey n°392, Ben Nevis & Fort William, 1:25 000. Etonnamment, le refuge CIC n’est pas indiqué sur la carte…

Plus : en cas de temps mort en vallée,il est possible de ne pas lâcher les piolets et de s’entrainer à l’Ice Factor. Cette salle d’escalade dispose, outre ses murs de résine, d’un gigantesque réfrigérateur dans lequel des murs de glace permettent de parfaire sa technique. The Ice Factor, à Kinlocheven (32km de Fort William, ouverture erratique ces dernières années).

Le Ben Nevis au loin, depuis le train de Fort William pour Glasgow. ©UL