Après 86 jours sur la glace, Mike Horn et Borge Ousland ont été rejoints par deux amis de Borge, avant d’être récupérés à minuit dimanche par un navire brise-glace. Tous deux spécialistes des mondes polaires, ils ont sans doute survécu à la plus difficile expédition de leur carrière, la traversée du pôle nord en autonomie. À bout de forces et au bout de leurs rations de fuel et de nourriture, les deux plus grands explorateurs actuels ont été sauvés in extremis.
Imaginez la tête de Mike Horn et Borge Ousland quand ils ont vu, pour la première fois depuis presque trois mois, un autre visage humain. Et même deux : copains de Borge Ousland, les norvégiens Bengt Rotmo et Aleksander Gamme ont évité à Mike Horn et à Borge Ousland de faire appel à l’hélicoptère. Alors les sauveteurs norvégiens ne sont pas venus seuls : ils sont venus du Spitzberg à bord d’un navire brise-glace affrété par les explorateurs pour venir à leur aide, et pour faire la jonction entre le duo d’explorateurs et le navire. L’océan Arctique est un chaos de glace parmi lequel Mike Horn et Borge Ousland ont eu énormément de mal à se frayer un passage. Surtout, ils vivent dans une nuit totale depuis des semaines : à cette époque de l’année, il n’y a plus le moindre rayon de soleil sur l’horizon. Samedi, les deux sauveteurs ont fait la jonction avec Mike Horn et Borge Ousland, avant de se diriger vers le navire The Lance. À minuit ce dimanche, les quatre hommes parvenaient à rejoindre sains et saufs le navire brise-glace. La fin d’une aventure impitoyable, qui a failli mal se terminer.
Sauvés in extremis
Il y a une quinzaine de jours, autour du 25 novembre, des messages de Mike Horn ont semé le doute, voire la crainte que les deux explorateurs polaires soient en perdition. Une image de Mike Horn a été postée, montrant un visage marqué et un nez sanguinolent, affecté par des gelures. Pire : l’infatigable Mike Horn s’est dit lui-même « faible« , à bout de forces, et ce qui était très préoccupant, bientôt à court de vivres. Jessica Horn, dans une interview au Parisien, évoquait l’idée d’un secours. En l’occurence, les aventuriers étaient alors dans une position presque dramatique : avec dix jours de vivres, et entre deux cent et trois cent kilomètres à skier pour établir une jonction avec l’eau libre et le navire de Pangaea, les calculs étaient vite fait. Impossible, avec une moyenne de 15 à 20 kilomètres au mieux. Surtout, la maudite dérive des glaces pendant leur repos les privait de kilomètres vers le sud, voire leur grignotait les kilomètres péniblement avalés la journée ! L’enfer des glaces, et sans exagérer. Leur voyage a été, d’un bout à l’autre extrême.
Une expédition sur le fil
On imagine sans peine la joie sans nom de Mike et Borge quand ils ont rencontrés leurs sauveteurs norvégiens. Heureusement, ces derniers jours, la dérive des glaces s’est atténuée, et semble t-il, a joué en leur faveur. Borge Ousland se réjouissait le 4 décembre d’avoir parcouru 29 km et atteint 82 degrés de latitude nord. Il y a quelques jours, les deux hommes se sont aperçus que le traîneau de Borge était fendu. Il a fallu le réparer, le recoller. Borge se félicitait dans son post du 4 décembre que la réparation tenait le coup. Et surtout qu’il ait vu le problème avant de mettre le traîneau dans un bras d’eau libre. « Si nous n’avions pas découvert ces fissures, tout aurait alors été trempé, le sac de couchage, les vêtements, etc, on aurait fini par devoir appeler les secours« .
Si nous n’avions pas découvert ces fissures dans le traineau avant de franchir un bras d’eau, j’aurais pu perdre mes vêtements, mon sac de couchage. Borge Ousland.
Borge Ousland © Mike Horn.
A droite, The Lance, le navire brise-glace qui a ramené les deux hommes et leurs deux sauveteurs.
Le 5 décembre, Borge Ousland annonçait qu’ils n’étaient plus qu’à 6 ou 7km de leurs sauveteurs, partis à skis depuis le navire brise-glace, The Lance. En effet, il était impossible au voilier de Mike Horn, Pangaea, de les rejoindre. Pour autant, The Lance a dû s’y reprendre deux fois avant de trouver le moyen d’aller plus au nord, se retrouvant coincé à son tour dans les glaces. Dès que cela a été possible, les deux skieurs Bengt et Aleksander se sont rués sur la glace pour aller à la rencontre de Mike et Borge, qui écrivait, le 5 décembre, n’avoir plus que quelques rations et deux bouteilles de fuel. Sans fuel, plus de boisson chaude. Il y avait donc urgence à sauver les deux hommes d’une expédition qui s’est transformée, depuis leur passage au pôle nord, le 29 octobre, en cauchemar. Finalement rejoint par les deux sauveteurs norvégiens amis de Borge et venus avec le navire brise-glace The Lance, les deux explorateurs ont sans doute compris qu’ils étaient enfin sauvés. Avant de rejoindre tous ensemble le navire à une quinzaine de kilomètres de là. Dimanche 8 décembre à minuit, les quatre hommes revenaient du bout de la nuit. À bord du navire, sains et saufs. Après 86 jours d’épreuves et de souffrance, Mike Horn et Borge Ousland sont venus à bout de cette inimaginable traversée du pôle Nord.
> À lire, notre récit complet : 86 jours sur la glace, le pôle noir de Mike Horn et Borge Ousland