On le savait : dans le contexte actuel, l’ouverture des remontées mécaniques « dans le respect des gestes barrières » ne se fera pas avant l’été prochain. Les skieurs de rando prévoient de s’entraîner en vélo d’appartement pour tenter le mont Blanc en juin, tandis que nombre de guides, devant la fermeture de l’Aiguille du Midi, proposent l’équipement de nouveaux canyons et via ferrata. Le président Macron a annoncé un confinement localisé, chacun devant rester dans sa limite des 10 kilomètres, sauf pour les licenciés FFCAM et FFME : leurs membres seront autorisés 100 kilomètres de son domicile selon la ministre des Sports. Aussitôt, les passionné.e.s de montagne se sont rués sur le calculateur de rayon, nouveau mètre-étalon du XXIème siècle, qui décide de la latitude de laisse individuelle comme de l’évolution sournoise des prix de l’immobilier.
Le calculateur de rayon, maître-étalon de la liberté individuelle
Sans surprise, les annéciens sont bien lotis, une fois de plus : les randonneurs d’Annecy peuvent donc se rendre aussi bien à Chamonix, dans le Mont-Blanc, que dans le Jura ou l’Oisans, et même dans les Écrins. Attention tout de même, la Barre des Écrins leur est interdite, tandis qu’à la Bérarde le Haut-Vénéon et le bassin de la Pilatte leur seront interdits, un soulagement pour tous les Grenoblois.
La Barre des Écrins, aussi lointaine que le Groenland. ©JC
C’est surtout à Lyon, et à Grenoble dans une moindre mesure, que la révolte gronde. Tandis que les grelous – comme les nomment affectueusement les tribus voisines – se voient privés de Chamonix, certains activistes ont déjà promis qu’ils braveraient l’interdiction en allumant un doigt d’honneur au sommet du Dôme des Glaciers, situé sur la frontière des 100 kilomètres.
C’est à Lyon que la décision jupitérienne suscite l’incompréhension : aucun massif digne de ce nom n’est accessible à moins de cent kilomètres, une réalité que nombre de lyonnais découvrent alors qu’ils avaient quitté Paris l’année dernière. Chamonix étant bien sûr inatteignable, les habitants de Quintal craignent pour leur commune, seule voie d’accès au Semnoz comprise dans le rayon des 100 kilomètres. Dommage, à cinq kilomètres près, les lyonnais auraient pu se baigner dans la rive ouest du lac d’Annecy. Prises d’assaut lors de l’antépénultième confinement, les communes de Chartreuse demandent l’aide de l’Etat, tandis que celles du Vercors Nord rappellent leur glorieux passé de résistance devant l’envahisseur, en attendant le sauvetage anglais – le vaccin britannique – qui comme d’habitude n’arrive pas.
Dans les Pyrénées, il semble que la ruée vers les bars espagnols ait limité les débordements suite à cette annonce présidentielle du 1er avril 2023.