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Bon sang 20 ans !

Marco Siffredi, l'Everest et nous

Pour beaucoup c’est une icône à la tignasse blonde ou verte selon les humeurs, un regard menthe glaciale et un sourire dont l’incisive écorchée révèle le tempérament . « Dans la poudreuse on est tous champions du monde. Y’en a plus un dès qu’c’est raide et un peu gelé, y’en a plus un qui fait un virage ». Balancée sourire en coin, cette punchline du film de Bertrand Delapierre, Marco Etoile Filante (Seven Doc, 2011), achèvera d’inscrire Marco Siffredi dans l’histoire du snowboard et de la pente raide en général.

Le 24 mai 2001, Marco Siffredi s’élance des 8848m du sommet de l’Everest et descend le couloir Norton en snowboard. Il trace alors la pente raide la plus haute du monde, moins de 200m à 50 degrés mais perchés sur le toit du monde, avec une neige changeante qui, plus qu’ailleurs, n’autorise aucune erreur.

Plus qu’un grand nom dans un panthéon, Marco est devenu un symbole. Il y avait certes sa liste de pentes raides, Nant Blanc à la Verte en tête. Mais au-delà des réalisations, il était un électron libre, insaisissable, rebelle et entier. Il était l’incarnation des valeurs les plus exhaltantes de la montagne. D’une certaine manière, il donnait au snowboard ses lettres de noblesse « alpines » en emmenant sa planche là où seuls les alpinistes et quelques rares skieurs osaient s’aventurer. Et de l’autre côté, il apportait une dose de fraicheur et de fun à cette haute-montagne austère, difficile à rendre accessible ou compréhensible aux yeux du grand public et des plus jeunes en particulier.

Le 8 septembre 2002, Marco s’élance dans le couloir Hornbein. Mais de celui-là, il n’en resortira pas. On ne le retrouvera jamais. 

Vingt ans jour pour jour après sa disparition, l’esprit de Siffredi continue d’inspirer tous ceux qui restent animés, au choix, par la fougue de la jeunesse ou la désinvolture permise par l’âge.

Marco aura toujours 20 piges

Mais vingt ans qui passent, ça vous change une femme ou un homme. Nombreux sont les anciens chevelus à s’être coupé les tifs. Les uns virent anars de droite, les autre anars de gauche, d’autres encore se rangent et marchent bien droit. Certains sont partis en vrille aussi.

Je me demande comment aurait été Marco Siffredi à 40 balais ? Avec des si… J’ose croire qu’il aurait toujours les cheveux colorés, les dents du bonheur, et qu’il continuerait à se moquer gentiment des freeriders, à envoyer balader les sponsors trop pressants et à choisir de pentes toujours plus incroyables. Andrzej Bargiel se serait certainement fait piquer la descente du K2 avant même d’être en mesure d’y songer. Pierre Tardivel aurait troqué les skis contre le snow bien plus tôt, avec un professeur de choix. Et le Hornbein serait une vieille histoire…

C’est absurde, je vous le concède. Marco aura toujours 20 piges. Vingt-deux ans précisément, qu’il a remplis avec la fougue et l’empressement de celui qui a compris que rien ne dure : « Pour vivre, il faut risquer. Déjà qu’on n’est rien, qu’on ne maîtrise rien, alors si en plus on laisse couler le temps ». Allez bon sang, il n’est jamais trop tard pour avoir 20 ans.