
Pourquoi la plus haute, la plus symbolique montagne des Alpes, le mont Blanc, est-elle la seule à ne pas être protégée en France ? Parce qu’il faut une volonté politique. La volonté politique ne tombe pas du ciel, mais du suffrage universel, décroché de haute lutte par des générations successives. Pourquoi voter ? On ne vote pas pour un candidat, ou une candidate. On vote pour l’intérêt général. Et la montagne dans tout ça ?
Les enjeux de la présidentielle, ce sont les choix collectifs qu’écoute le ou la futur(e) président(e) de la République. Dans notre Ve République à la verticalité parfois surplombante, le président gouverne, le gouvernement traduit, les parlementaires valident – ou non. Dans tous les grands domaines le Président imprime sa marque, que ce soit l’économie, l’environnement, l’éducation ou la justice, et le monde de la montagne, ses acteurs, et vous, lecteur, lectrice, êtes concernés. C’est le moment où l’on doit discuter du cap à prendre, comme le font les élus de l’ANEM, qui ont écrit 85 propositions à destination des candidats à l’élection présidentielle.
©Jocelyn Chavy
Prenons l’environnement. Et bien, il reste beaucoup à faire (litote). Dans le volet « Mobilité » du Plan Avenir Montagne du gouvernement annoncé en 2021, pas une seule fois n’était cité le mot « train » *. La compétence des transports est (d’abord) celle des régions, mais peut-on laisser pousser des « ascenseurs valléens » sans parkings bien dimensionnés, sans penser la mobilité nationale et internationale ?
Prenons l’économie. En montagne il pleut des dollars, pardon, des euros, en neige de culture, et cela ne semble pas près de changer – à quelques exceptions près (citons Métabief) qu’il faudrait multiplier.
Gardons à l’esprit que les arbitrages sont faits au plus haut niveau de l’État, avec les Préfets d’un point de vue administratif et environnemental par exemple. Sur le plan économique, l’État, avec le bras armé de la Caisse des Dépôts, qui contrôle la Compagnie des Alpes, garde la haute main sur les projets de développement touristique de niveau national. Oui, en montagne, l’État peut beaucoup. Mais le veut-il ? En témoigne la visite d’Emmanuel Macron à la Mer de Glace en février 2020. Face aux conséquences du réchauffement climatique et au recul du glacier, le Président avait déclaré : « c’est vertigineux », et il ne parlait pas des Drus éboulés.
Une nouvelle mandature est une occasion de faire que la montagne change.
Loin de nous l’idée de se ranger à l’idée, défaut bien français, que le Président peut tout, et doit tout faire. Mais une nouvelle mandature, quel que soit le Président élu, est l’occasion de briser l’immobilisme, de faire que la montagne change. Pour que la montagne soit préservée. Pour que des communes de montagne soient aidées à la transition du tourisme, et pour taper sur les doigts de celles qui se moquent des engagements qu’elles prennent.
Pour que la montagne soit un territoire économique où ses habitants peuvent vivre. Pour que la montagne, sa culture, son patrimoine – y compris immatériel**- soient préservés. Pour que les sports de montagne soient accessibles pour les jeunes ou les moins favorisés. Pour que la montagne ne soit pas, comme dans les Hautes-Alpes, le sombre théâtre où l’État course des réfugiés. Pour que toutes celles, et tous ceux qui aiment la montagne puissent transmettre cette passion qui nous anime, ces paysages qui nous dévorent et nous construisent.
Pour toutes ces raisons, la rédaction d’Alpine Mag consacre un dossier spécial sur les enjeux de la présidentielle 2022 à découvrir ci-dessous.
* Lire à ce sujet la revue Les Passeurs n°2, la montagne zéro carbone mode d’emploi.
** L’alpinisme a été classé au Patrimoine Immatériel de l’UNESCO et sa pratique doit être défendue à ce titre par la France.

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