Aucun parapentiste n’avait jamais décollé du K2 jusqu’à ce jour du 28 juillet dernier, véritable jour de fête pour l’himalayisme français. Ce jour-là, on l’a raconté, quatre français parviennent au sommet, sans oxygène. La fusée Benjamin Védrines en moins de onze heures, le couple Liv Sansoz Zeb Roche, tous les 3 par la voie normale, et Jean-Yves Fredriksen par la voie des Basques en solo. C’est Benjamin Védrines qui inaugure le premier vol en parapente du sommet du K2, tandis que Liv et Zeb signent le premier vol en biplace. Blutch réussit lui aussi le vol en parapente du K2. Historique !
Le secret a été gardé jusqu’à aujourd’hui. Et pour cause. Après l’accident d’un parapentiste sur le Baltoro, les autorités pakistanaises avaient interdit tout vol en parapente, malgré les autorisations obtenues en amont. Mais pour les quatre français engagés sur le K2 depuis plus d’un mois, difficile d’imaginer la descente – longue et dangereuse, quoi qu’il en soit – sans parapente. Entraînés et extrêmement habitués au vol en haute montagne, des Français sont bel et bien descendus en parapente du sommet du K2, 8611 m, le 28 juillet. Et comme il nous l’a confirmé ce jour, Benjamin Védrines signe la première descente en parapente du K2, historique !
Premier au sommet des quatre français, Benjamin Védrines est parti le dernier : en l’occurence, la fusée Védrines s’est élancée dimanche 28 juillet 2024 à 0h10 du camp de base avancé (5350 m), après 40 jours d’attente. À la montée, il double Liv et Zeb, puis Jean-Yves un peu plus haut, au-dessus du Bottle Neck. Le temps est beau, la température très douce, les deux hommes prennent le temps de discuter.
Puis Benjamin Védrines atteint la cime, après 10h 59mn 59s d’ascension, le record du K2. L’émotion est forte. Il déplie sa voile, se prépare. Et s’élance. « Ce sont des années d’expérience que j’ai mis à profit ce 28 juillet, en combinant alpinisme de vitesse en haute altitude et maîtrise du parapente. Une nouvelle fois, j’ai ressenti d’indescriptibles sensations et émotions ce jour-là » a-t-il expliqué.
Après la première de l’Everest en parapente – Boivin en 1988 – c’est à nouveau un français, Benjamin Védrines, qui signe le premier vol en parapente du K2. Trente minutes après avoir décollé, le voici au camp de base du K2 ! Un vol historique de trente minutes, soit la plus rapide descente du K2 de tous les temps, une journée folle qu’il nous raconte en détail quelques jours plus tard.
Ajouter un temps record et une descente record est dans la droite ligne de ce que Benjamin a réalisé au Broad Peak il y a deux ans. Un exploit, car il faut ajouter à l’extrême fatigue d’une montée d’une seule traite la concentration nécessaire pour voler dans ces conditions, une altitude où aucun parapentiste ne s’est jamais risqué, à l’exception d’Antoine Girard, parti de la vallée, en 2021, et qui a survolé le Broad Peak, à plus de 8400 mètres. Védrines signe également le plus haut vol en parapente jamais réalisé.
Benjamin Védrines prépare son vol au sommet du K2 ©Védrines
La joie que l’on imagine lors de ce vol exceptionnel ©Védrines
De son côté, Jean-Yves « Blutch » Fredriksen raconte. Dimanche 28 juillet après-midi. « Je suis prêt à décoller. Mais le vent est nul, zéro, que dalle, nibe ! Une belle rafale me prend enfin en charge. Je n’hésite pas une seconde. En un quart de seconde je me suis retourné et cours dans la pente. Je m’envole juste avant le trou. Je ne suis pas essoufflé et m’empresse d’enlever mes gants pour rallumer ma caméra. Je n’ai plus qu’à ouvrir grand les yeux, m’imprégner de ce vol et de ces paysages de malade que je ne verrai qu une seule fois dans mon existence. Je me sens immensément libre. »
Vingt minutes plus tard, Blutch atterrit non pas au CB mais à côté de sa tente à 6600 mètres. Il doit ramener son matériel en bas. Mais ce ne sera pas par la voie des airs. « Après avoir remballé mon bivouac, le sac de 25 kilos qui me scie les épaules et une brise descendante m’interdisent de reprendre mon envol. Pour une dernière nuit, j’ai le K2 pour moi tout seul. »
Blutch et son vol mythique au K2 ©Coll. JY Fredriksen
Blutch et son vol mythique au K2, devant le Bottle Neck ©Coll. JY Fredriksen
Premier vol tandem au K2
Zeb Roche a réalisé la premier vol tandem à l’Everest avec Claire Bernier. C’était en 2001. Vingt-trois ans plus tard, c’est avec Liv Sansoz qu’il forme une cordée pour le K2 avec l’objectif de voler en parapente, en tandem naturellement, Liv Sansoz étant par ailleurs elle-même pilote chevronnée.
Jusqu’ici, aucun parapentiste n’avait encore décollé en tandem du sommet de l’un des plus haut sommet de la planète, le K2 qui culmine à 8 611m. Liv et Zeb signent ici le premier vol en biplace du K2. La cerise sur le gâteau d’une belle ascension : Liv est devenue la deuxième Française à gravir le K2 sans oxygène, plus de trente ans après l’alpiniste Chantal Mauduit.
Le choix du décollage en tandem a permis à cette altitude de 8 611m de décoller en même temps, afin ne ne pas risquer de laisser son partenaire seul, tout décollage étant aléatoire. L’esprit de cordée jusqu’au bout : Liv ayant assuré le portage du biplace jusqu’au sommet, Zeb a eu la tâche de réussir ce premier décollage, un exploit en tandem.
« Cette expédition est réussie au-delà de mes rêves, je suis encore en apesanteur… », se confiait Zeb Roche à son retour en France la semaine dernière. « Nous n’en revenons toujours pas, renchérit Liv Sansoz. C’était fou là-haut ! Plus on montait et plus c’était dur, mais plus on avait la certitude que nous allions y arriver. Nos corps ne répondaient pas normalement, mais nous étions hypers lucides. Quand nos pieds ont quitté le sol, ce fût littéralement un moment de grâce ! ».
Le décollage du K2, un exploit en tandem
Décollage du K2 en tandem pour Liv et Zeb
©Coll. Liv Sansoz Zeb Roche
Vol mythique en tandem sur fond de K2 pour Liv et Zeb
©Coll. Zeb Roche Liv Sansoz
