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Exploit de Charles Dubouloz en solitaire aux Grandes Jorasses

Rolling Stones en face nord

Face nord des Grandes Jorasses ©J. Chavy

Il a passé six jours et cinq nuits dans l’ombre des Grandes Jorasses : du 13 au 18 janvier, Charles Dubouloz a gravi en solo la face nord par la voie Rolling Stones, l’une des plus longues et plus difficiles voies d’une paroi qui n’en manque pas. Charles Dubouloz réalise ainsi l’une des plus belles ascensions solitaires de ces dernières années, et s’inscrit dans l’Histoire de la face nord des Jorasses.

C’est le plus haut, et l’un des gros morceaux de la face nord des Grandes Jorasses : l’éperon Walker, qui mène au point culminant, à 4208 mètres. Mais Charles Dubouloz n’a pas choisi la classique voie Cassin, itinéraire de la première historique, ou encore l’une des goulottes réputées plus rapides à droite de la Walker (Mc Intyre) ou à gauche (Linceul) : il a gravi la voie Rolling Stones, située juste à droite de la plus connue Desmaison-Gousseault et à gauche de la Cassin. C’est une voie ouverte par une équipe tchèque en 1979, peu répétée. Après une première répétition par la cordée Enoît Grison Eric Gramont en 1984, c’est Stéphane Benoist et Jérôme Thinières qui font la troisième ascension en janvier 2002. Ensuite, la voie est répétée de temps à autre, mais rarement.

Charles Dubouloz dans le haut de la face, le Linceul est visible. ©Seb Montaz

Une ascension historique

Après l’approche, Charles Dubouloz s’est lancé dans la face vers 14h30 jeudi 13 janvier. Il en est sorti hier mardi 18 janvier en fin d’après-midi, après avoir passé six jours et cinq longues nuits dans la face nord qui en janvier ne prend pas le soleil.

Les premiers solos hivernaux de la face nord des Jorasses remontent à 1978 (Ghirardini, éperon Croz) et 1979 (Hasegawa voie Cassin) Si les solos en face nord des Grandes Jorasses deviennent fréquent dans les voies historiques durant les années 80 avec les talentueux Christophe Profit et Eric Escoffier, les dimensions de la paroi hors normes font que les voyages solitaires en hiver restent très rares.

Dans les années 90, des solitaires comme Slavko Sveticic, Marc Batard (1992), Jean-Christophe Lafaille (1992 et 1999) se lancent en hiver dans des ouvertures d’ampleur. On pense également à Lionel Daudet (qui répète Eldorado de Babanov l’hiver 2000). Tous passent plusieurs jours en solitaire dans les Jorasses en plein hiver. Au début des années 2000, signalons l’un des solos les plus marquants, celui de Patrice Glairon-Rappaz qui répète en solo la voie No Siesta, en juin 2000, mais à la belle saison donc.

Historique.

Fin des années 2000, tandis que des alpinistes comme Ueli Steck transforment la face nord en course contre la montre (2h21 pour les goulottes Colton-McIntyre), des cordées vont peu à peu réduire les temps de parcours des voies le plus difficiles, d’une semaine à 3 jours, puis de 3 jours à parfois la journée, mais aucun alpiniste n’a osé se lancer en solo et en hiver dans un parcours aussi engagé que Rolling Stones depuis ceux cités plus haut.

C’est pourtant le choix qu’a fait Charles Dubouloz en se lançant dans cette voie. Charles a cherché sans doute à s’auto-assurer au maximum : ce pourquoi il a dû emmener un sac de 35 kilos. Il a passé ses nuits dans un hamac. Cette ascension est sans doute l’une des plus belles de la décennie pour celui qui a transformé son premier « essai » en solo, la face nord des Drus l’hiver dernier, en coup de maître cette fois aux Grandes Jorasses. Sans doute son expérience en Himalaya sur le Chamlang avec Benjamin Védrines, avec l’ouverture d’une voie extrême, la fait évoluer.

Dubouloz inscrit son nom dans l’Histoire hautement symbolique de la face nord des Grandes Jorasses, celle qui depuis bientôt un siècle cristallise les passions alpines de ce côté-ci des Alpes. Chapeau bas !

© Charles Dubouloz

Sortie de l’éperon Walker pour Charles Dubouloz. ©Seb Montaz