La myopie du récit

En montagne, il existe une règle mécanique, quasi absolue.
Plus vous y allez, plus vous vous frottez à elle, plus vous en parlez avec douceur et simplicité, moins vous évoquez l’âpreté et le sensationnel des expériences vécues là-haut. Plus votre récit s’allège.
Rébuffat et Bonatti n’écrivaient que sur l’esthétique et la poésie des hautes terres quand ils auraient pu s’épandre sur les faces nord du Piz Badile ou du Cervin. Potard a descendu le couloir de la Table, 45°, tout schuss, tout seul et tout frisson, de ces moments où l’on jette en l’air la pièce de son existence. De cela nous saoule-t-il ? Non. Ce sont les bonheurs de la convivialité qui ont la faveur de sa plume trempée dans un rouge à 13°. Damilano s’est ancré plus que d’autres dans des glaces fragiles, les meilleurs grimpeurs de nos jours s’y aventurent avec crainte et ce sont le