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Deux poids deux mesures ?

La Pierra Menta annulée, mais pas Paris-Nice. Les championnats de France de cross country annulés, mais pas les matchs de foot. Faut-il pratiquer un sport qui passe tous les jours à la télé pour survivre au coronavirus ? 

Alors que tu lis ces lignes ce lundi en repensant à cette mirifique sortie de ski de rando du weekend, des dizaines de milliers de supporters auront fréquenté au même moment les stades pour les matchs de Ligue 1. Mieux, dimanche 8 mars, la vénérable course cycliste Paris-Nice aura pris son départ, une première étape avant une semaine entière à rassembler les foules bigarrées autour de la petite reine. Pourtant, jeudi 5 mars, la nouvelle tombait, tel un couperet : la plus grande course de ski-alpinisme, la Pierra Menta, était annulée. En cause, l’épidémie de coronavirus ou covid-19. Alors quoi ? On ne badine pas avec le principe de précaution : en témoigne les matchs susnommés… et on sabre les épreuves sportives en plein air, mais pas toutes !

On sabre les épreuves sportives en plein air, mais surtout celles qui ne font pas d’audimat.

En l’occurence, le marathon de Paris a été annulé (reporté en septembre), de même que les championnats de France de cross country. Et la Pierra Menta, elle, n’a jamais été empêchée en 34 éditions malgré des années où la nivo donnait des cheveux blancs aux traceurs. Donc oui, le Grand Mont, le culmen du Beaufortain et de la Pierra Menta, c’est 3000 spectateurs les bonnes années, celles où il fait beau et où le risque d’avalanche n’est pas trop marqué. Sinon, le matin au départ, les coureurs sont plus nombreux que les spectateurs.

Combien d’événements en France rassemblent quelques milliers de montagnards, généralement éparpillés dans la montagne ? Peu, à l’exception notable de l’entreprise UTMB à Chamonix. À Arêches, six mois de travail des bénévoles partent en fumée. Alors pourquoi annuler la Pierra Menta ? Crainte de l’Italie, dont les équipes de ski-alpinisme (avec Matteo Eydallin et Damiano Lenzi) sont favorites ? Celles-ci étaient vraisemblablement déjà confinées dans leur pays. Crainte des échanges, des voyages des équipes d’un bout d’Europe à l’autre ? Et Paris-Nice ? Ce n’est pas une réunion de voisinage, question barnum. La Pierra Menta, à côté, c’est une réunion de bac à sable. Il est visiblement plus facile d’interdire ce genre de réunion que de limiter le trafic camion sous le mont Blanc ou sur le col du Lautaret – mais je m’égare.

Paris-Nice ? La Pierra Menta, à côté, c’est une réunion de bac à sable.

La Pierre, comme disent les initiés, c’est de la magie. Comme sur le sommet aérien de la Légette du Mirantin, d’où plongent droit dans l’pentu des coureurs qui ont déjà 2000 mètres de dénivelé dans les pattes. Comme les larmes de joie d’un Mathéo Jacquemoud, quand il triomphe en 2016 avec son pote Kilian Jornet. Ou comme le sourire de Laëtitia Roux, modeste malgré son immense talent. Comme la bonne humeur des gars et des filles montés au Grand Mont avec le saucisson (et le Beaufort) pour soutenir les copains et profiter d’une vue inoubliable sur le mont Blanc et sur …la Pierra Menta. À l’année prochaine.