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Merci juillet

Ça t’avait manqué… ou du moins tu le pensais. Au refuge, ton voisin (ou ta voisine) qui ronfle la nuit. Au pied de la voie, cette cordée qui a une bonne demi-heure d’avance et squatte le premier relais, tandis que tu marches sur ta langue pour ne pas finir derrière les deux autres cordées. Retrouver le plaisir d’une soirée en montagne, d’une aventure verticale, c’est aussi se coltiner tous les anonymes venus jouir en même temps que toi des mêmes lieux et des mêmes paysages. Et d’une liberté qu’on savoure après l’avoir connue version canada dry (et c’est un mauvais jeu de mots).

La Pilatte, et les Bans, avec le très fin couloir nord au centre. ©JC

Ces lieux justement : ils prennent une claque, même si ce mois de juillet est arrosé. Pour la première fois, un refuge dans les Écrins, celui de la Pilatte, est fermé pour cause de fissuration (et de risque pour le public). Comme l’écrit Pauline Boulet dans son article, la raison n’en est pas le dégel du permafrost mais le recul du glacier, qui provoque l’instabilité du monticule sur lequel est bâti le refuge. En gros, le refuge est en danger car le sol bouge en profondeur à cause du retrait glaciaire, à un rythme que les scientifiques comme Ludovic Ravanel ne peuvent encore estimer, ces phénomènes dus au réchauffement climatique étant nouveaux. Mais quid des autres infrastructures en altitude, du tourisme en montagne ?

Au conseil municipal de Chamonix, on pense avoir trouvé la solution pour le futur, en l’occurence au Montenvers, où la Mer de Glace se fait chaque année plus lointaine : 53 millions d’euros pour un « nouveau télécabine d’accès et un Centre d’Interprétation des Glaciers et du Climat ». J’aurais préféré qu’on dépense ces millions pour dévier, détourner, taxer ou mettre sur des trains les centaines de camions qui parfument les vallées et franchissent le tunnel du Mont-Blanc chaque jour.

Juillet est pourri, certes. Mais ça t’avait manqué, la montagne

Dans l’article sur la Pilatte, il y a une photo du glacier, et du sommet des Bans, 3669 m, où l’on distingue le mince filet de glace qui s’appelle le couloir nord des Bans. A la fin du XXème siècle, c’était un large ruban de glace, où les cordées s’entassaient joyeusement. Époque révolue, croyais-je par erreur. Un lecteur attentif m’a précisé qu’il avait parcouru ledit couloir récemment – et de fait, il est encore gravi régulièrement ! Fin prématurée du refuge, peut-être, mais pas des Bans, qu’on se le dise !

Alors oui : juillet est pourri, les refuges à mi-jauge sont pleins, les voies méconnues sont devenues courues, merci camptocamp, tes pieds sont défoncés, mais bon sang, oui, ça t’avait manqué.