K2 mon amour : le film et l’après-K2 de Liv Sansoz

Chamonix Film Festival

Le 28 juillet 2024, Liv Sansoz et Bertrand Roche (alias Zeb), ont écrit une belle page de l’himalayisme en gravissant le K2, 8611m, sans oxygène, puis en décollant du sommet en parapente biplace. Une première en tandem, et une date historique puisque le même jour Benjamin Védrines – premier des quatre – et Jean-Yves Fredriksen signaient eux aussi une descente par les airs. K2 mon amour est l’un des films à voir absolument au Chamonix Mountain Festival, où seront présents Zeb et Liv. À qui on a demandé comment elle avait vécu cette histoire de couple, et l’après K2. 

Elle a toujours les yeux qui pétillent à l’idée d’en parler. Elle qui n’avait jamais gravi de 8000 s’est entraînée, beaucoup, avant de partir dans le Karakoram l’été dernier. Liv Sansoz s’est encordée avec Bertrand Roche, alias Zeb, son compagnon dans la vie, pour tenter le second sommet le plus haut de la Terre. Le 28 juillet, quatre français font de ce jour une date historique en s’envolant tous en parapente. Tous sont montés sans bouteilles d’oxygène !

Mais Liv et Zeb, tous deux guides de haute montagne, font une double première : la descente en parapente biplace, discipline ô combien délicate dans l’air raréfié des 8000. Avec le soutien de son sponsor Vuarnet, Liv Sansoz a pris le temps de nous raconter comment elle a vécu la suite de l’histoire.

Et bonne nouvelle pour vous : Liv et son compagnon seront au Chamonix Film Festival le 14 juin, le matin pour une conférence et brunch avec le public au Plan B pour parler du film, et le soir pour la projection de K2 mon amour à 20h30 au Cinéma Vox. Assurément une soirée à ne pas manquer. Retrouvez le teaser du film réalisé par Mathieu Rivoire en fin d’article.

Pour cette fameuse ascension et envol du K2, vous avez envisagé dès le départ de prendre un seul parapente biplace, et pas un parapente chacun. Pourquoi ? 

Liv Sansoz : j’avais imaginé que Zeb serait dix fois plus en forme que moi parce qu’il a plus d’expérience de la haute altitude et qu’il est plus fort que moi physiquement. Mais en fait, on a réfléchi. On s’est dit, si l’un d’entre nous part devant, et que l’autre commence à avoir des hallucinations, ou un autre problème, personne n’est là pour lui sauver la vie. Alors que si on est sûrs de vouloir rester ensemble, on reste une cordée.  Soit on atteint tous les deux le sommet et on decide de descendre en parapente ensemble, soit les deux on décide de faire demi tour, de descendre à pied ou de décoller, mais on demeure tout le temps ensemble. Et donc pas de parapente solo.

Le bonheur à deux. ©Coll. Zeb Roche / Liv Sansoz

Est-ce que tu craignais aussi que l’un décolle et l’autre reste planté ? 

À Chamonix non, parce que si c’est délicat Zeb va m’aider à décoller et lui sait gérer toute sorte de situation. Mais là-haut… quand même, on n’est pas pareils qu’au sommet du mont Blanc ou sur un 4000 des Alpes. Zeb a l’expérience des 8000 mais malgré tout pour la première à l’Everest [Zeb Roche et Claire Bernier ont réalisé le premier vol à l’Everest en biplace en 2001, NDLR] ils l’ont fait avec une bouteille d’oxygène, soit peu, mais quand même ! Donc Zeb aussi avait cet inconnu de comment il allait être en haut.  Pour le K2, on s’est dit que si lui m’aidait à décoller puis ensuite il avait un problème, ça serait horrible. 

Vous l’aviez décidé en France ou sur place ?

En France, avant de partir. On avait pris des ailes solo en se disant, on s’en servira quand on va monter poser du matos en camp d’altitude, on redesencdra en volant. Mais cela ne s’est pas du tout passé comme ça parce qu’on avait pas la météo pour.

Liv Sansoz cet hiver à Avoriaz. ©Jocelyn Chavy

Parle-nous de la question du couple. Cela doit être formidable de partager ces performances extrêmes mais ce n’est pas courant ! Qu’est-ce que toi, Liv, ça t’a apporté en plus ? Ou a mis en jeu ?

Liv Sansoz : le K2 a beaucoup renforcé notre couple parce qu’on a appris à se connaître encore plus. On se connait bien depuis un moment mais on est ressortis de cette expérience encore plus proches. À la fois on était dans la protection de l’autre, pour gérer l’autre si jamais il ne va pas bien. Mais on était tout le temps ensemble. À prendre soin de l’un et de l’autre. Sous le sérac du Bottle neck [à plus de 8000 mètres, NDLR], j’ai vu que Zeb était en train de ralentir. Je lui ai demandé s’il voulait qu’on s’arrête là. Il m’a dit non. S’il avait dit oui, c’était pas grave. On ouvrait le parapente et on rentrait au camp de base. 

le K2 a beaucoup renforcé notre couple parce qu’on a appris à se connaître encore plus. Liv Sansoz

Comment ça s’est passé au camp de base ?

Avouons que c’était parfois très pénible ce camp de base car il neigait tout le temps ! Il faisait moche tous les jours ou presque : sur le mois de juillet on a fait six sorties seulement ! J’étais dans la tente, et je me disais, au fond je suis là avec l’homme de ma vie, qu’est-ce qui peut se passer ? Tout va bien. Cette expérience nous a vraiment renforcés, même encore plus rapprochés.

L’affiche du film de M. Rivoire

Liv, tu as été deux fois championne du monde et trois fois vainqueure de la coupe du monde en escalade. Après de telles émotions, il faut rebondir. Parle-nous de l’après K2. Quand on a marché sur la Lune, ce n’est pas facile de revenir sur Terre, non ?

Liv Sansoz :

Complètement. Avec les compétitions d’escalade, à l’époque j’étais habituée à gagner la compète le samedi, le lundi tu es high, sur ton petit nuage, le mercredi tu redeviens sur Terre. J’étais en cours à la fac en plus. donc j’ai vite compris qu’il fallait se donner un autre objectif derrière, pour ne pas plonger. L’objectif peut être sportif ou dans un autre domaine. Peu importe.

Après ce K2 en parapente, je pensais qu’on allait se prendre une grosse claque au retour. J’avais anticipé le fait que quoi qu’il arrive, on vivrait un truc de fou et qu’il faudrait ensuite reprendre le quotidien.

En fait on est rentrés en France un jeudi, on a fait une fête le vendredi soir, et Zeb partait travailler en Maurienne le samedi ! De mon côté j’étais occupée aussi, donc on n’a pas eu de coup de mou. C’est mon père au téléphone qui m’a dit : «j’ai un coup au moral, j’étais habitué à regarder où vous en étiez tous les matins, là j’ai plus ça !»

Aujourd’hui avec Zeb on a plein de projets perso et des projets montagne. Et sinon, on se marie en juin !

Et quels projets montagne ? 

On va retourner en haute altitude, sûrement. Après, on prend le temps, pas de fuite en avant [rires, NDLR] ! Il faut que ce soit quelque chose qui a du sens, un projet chouette. Perso, entre ma quête des 82 sommets de plus de 4000 et le diplôme de guide il s’est passé quatre ans. Puis entre le guide et le K2, il s’est passé deux ans. Donc, il faut du temps. Sans compter que d’autres projets plus petits nous occupent entre les gros projets !

Retrouvez la cordée Liv et Zeb et le film au Chamonix Film Festival

Une conférence avec Liv et Zeb au Plan B : c’est le combo brunch concoté par le festival samedi 14 juin à 9h. Inscriptions sur le site du festival.

Le film K2 mon amour au Chamonix Film Festival réalisé par Mathieu Rivoire sera projeté le samedi 14 juin à 20h30 au Cinéma Vox. Réservez vos places !