C‘est beau non, la distanciation ? C’est un mot qui fait intello tout en étant plutôt clair : se donner de l’air !
Et en ces temps de virus virevoltant, les pouvoirs publics nous invitent à la « distanciation sociale » (en attendant le confinement ?). Comprenez ici : ne plus serrer la main, garder un mètre et quelques de distance avec les autres, éviter les rassemblements… Contraignant ? D’une certaine manière, pas tant. Voire enthousiamant !
C’est chez les alpinistes, grimpeurs et skieurs un bon moyen de grimper sans chuter lorsqu’ils sont en montagne (et ça, ce n’est pas encore interdit en ce lundi 16 mars, 8h).
Pour éviter la transmission de chutes et de chocs divers et variés en altitude, il convient depuis la nuit des temps alpins de laisser une distance entre soi et les autres pour éviter de subir ou de provoquer des chutes de pierres ou de glace. Mieux : la distance permet également de se laisser du temps pour réagir : à une chute en crevasse, à la rupture d’une plaque à vent, à la zippette d’un camarade de cordée…
Laisser de la distance pour se laisser du temps, et si c’était la clé ? D’un coup, le temps n’est plus de l’argent (même si beaucoup en perdent, on sait ce que c’est…).
Et soudain revient le sens. Celui des instants choisis lorsque l’horloge de la course quotidienne s’arrête. Le sens de ce dont on va avoir besoin pour manger, boire, vivre au jour le jour en se préoccupant du présent, l’avenir proche étant incertain, du moins beaucoup plus flou qu’à l’accoutumée. Ah vous vouliez de l’aventure ! Voilà un nouveau quotidien à instagramer !
Laisser de la distance pour se laisser du temps,
et si c’était la clé ?
Et au bout de cette chaîne de ralentissements en cascade, de distance en temps, et de sécurité en gain de sens, on en vient à retrouver, enfin, le recul. Vous savez, ce mélange d’heures et de kilomètres qui nourrit l’intellect tout en ouvrant les écoutilles et les mirettes (rien de plus utile qu’un livre sur une île deserte).
A y regarder de plus près dans le dictionnaire, se distancier (avec un i) comme « action de créer une distance entre soi-même et le monde extérieur » aurait presque des airs de savoir-vivre, voire par les temps qui courent, de savoir-survivre. Pas au virus non, ça on y arrivera, on le sait tous, de manière plus ou moins inquiète.
Non, on parle ici de survivre à la course aveugle qu’on ne voyait plus, étant nous-mêmes athlètes de haut niveau au jeu du chrono. Qui court dans le sens du vent ne perçoit aucun souffle. Ralentir aujourd’hui est une prise de conscience. Faire un pas de côté demain sera ébouriffant. Vivement maintenant.