La saison de glace s’ouvre traditionnellement avec la première véritable chute de températures mais aussi avec un évènement connu des amateurs de cascade : le bien nommé Cogne Ice Opening. Pour cette dixième édition, les organisateurs que sont Matthias Scherer, Heike et Tanja Schmitt ont su mobiliser les glaciairistes passionnés ou débutants après une année blanche en 2020. Bilan : les stages étaient complets, les sponsors de retour avec le matériel de prêt et la plupart des cascades en bonnes conditions. L’occasion parfaite pour découvrir Valeille et Valnontey, les vallées aux 200 cascades.
On les aime ces rassemblements de cascade de glace. L’ambiance y est toujours intimiste, à l’image de cette pratique de niche dans la niche qu’est déjà l’alpinisme au sens général du terme. Ici, pas de grands podiums, pas de speaker, pas de dossard, aucun superflu. La cascade de glace est une discipline qui ne souffre pas les artifices. Pas vraiment dans l’air du temps. Et c’est tant mieux.
Et pour cause : il faut oser s’aventurer très tôt le matin dans le froid hivernal, s’équiper chaudement, emmener du matériel plutôt piquant (crampons et piolets) pour ensuite s’enfoncer dans des vallons qui ne voient jamais le soleil de l’hiver.
Et pourquoi ? Pour enfin toucher un élément fascinant qu’est la glace et gravir des structures éphémères dont les formes, l’aspect et les couleurs sont uniques en montagne.
une expérience unique
Alors oui la cascade de glace est une pratique exigeante mais elle offre une expérience unique dans un univers qui dure deux mois, trois les bonnes années. Plus encore que la neige, la glace vous emmène loin, très loin. Au sens propre bien sûr puisqu’il faut parfois marcher longtemps pour atteindre un objectif, comme dans le long vallon de Valnontey dont les marches d’approche atteignent souvent les deux heures, parfois dans une neige non tracée ce qui nécessite souvent un départ à la frontale pour s’assurer de trouver une glace bien froide.
Mais plus symboliquement, gravir une cascade est une expérience unique dans le sens où elle mobilise plus que toute autre discipline alpine, l’ensemble des compétences, de l’attention et de la compréhension du milieu.
Pas de frontières pour Cogne
C’est pour cela qu’un évènement comme le Cogne Ice Opening propose des stages encadrés par des guides de haute-montagne, en petits groupes, ce qui est idéal pour découvrir les bases de la cascade. Gestuelle, technique, lecture des lignes possibles, analyse des structures,bases de la formation d’une cascade, compréhension des conditions de températures etc.. Les paramètres sont nombreux mais accessibles à qui sait prendre le temps.
Une fois les chaussures prêtées par Scarpa réglées, et les piolets et crampons ajustés que mettaient à disposition Grivel, Cassin et Petzl, la quarantaine de participants a pu partir à la découverte de de la glace sur les moulinettes de l’Amphithéatre de Lillaz, juste au-dessus de la cascade éponyme très fréquentée en été. Cette année, malgré les difficultés pour voyager en raison des restrictions liées au gros rhume-19, de nombreux grimpeurs sont venus de loin : Royaume-Uni (bel exploit), Belgique, Suisse, Suède, Espagne et France bien-sûr. Une performance en soi !
Pour leur part, les guides de Cogne et de Courmayeur (et même un guide des Dolomites !) assuraient la sécurité de tout ce petit monde. Plus haut, certains peaufinaient leur gestuelle et leur force sur le site de dry-tooling ou Tanja et Matthias faisaient une démonstration dans « le M6 à Jeff Mercier !« .
La glace au cinéma
Après un bon cappuccino à l’Ondezana, le repaire des grimpeurs, le rassemblement se poursuivait au cinéma de Cogne avec des conférences et projections de films de montagne. Matthias Scherer et Tanja Schmitt y présentaient un historique de la pratique avec pour point d’orgue la cascade de référence dans le secteur qu’est Repentance Super, un magnifique grade 6 gravie 51 fois pas le couple à la ville comme à la montagne.
Angelika Rainer, trois fois championne du monde d’escalade sur glace y a aussi exposé sa vision de la performance et sa pratique du haut-niveau. Et enfin, Matteo De Zaiacomo, membre du célèbre club de montagne italien des Ragni di Lecco, a raconté son ascension du Baghirati IV.
De quoi voyager et appréhender de multiples facettes de la discipline avant, pourquoi pas, de prolonger l’expérience dans les cascades de plusieurs longueurs de Cogne, voire au mois de février en Norvège avec l’Arctic Ice Festival organisé par le même trio et promettant encore de belles envolées glacées. On vous parle de tout ça très bientôt…