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Belle aventure en Jordanie pour l’équipe FFME Roc Aventure Programme

Ouverture sur le Djebel Rum

Guillaume Colin dans la voie du Coeur, L11, 6b+ ©Bouquet des Chaux

L’équipe Roc Aventure Programme (RAP) de la FFME vient de rentrer de Jordanie avec une belle réussite collective, l’ouverture d’une grande voie majeure dans le Wadi Rum. Ou comment des jeunes ex-compétiteurs falaisistes et adeptes de la résine sont devenus des grimpeurs aventuriers, avec l’aide de coachs talentueux, Arnaud Petit et Jonathan Crison. Récit et interviews.

Ils ont entre 20 et 24 ans. Tous ont un passé (ou un présent) de compétiteurs en escalade, et un haut niveau qui va avec : les filles comme les garçons grimpent a minima dans le 8b+ après travail, et même à vue pour l’un d’eux. Mais l’escalade ne se résume pas à la compétition, ni à la résine : c’est pourquoi la FFME a lancé l’équipe Roc Aventure Programme (RAP), avec l’idée d’ouvrir à de nouveaux horizons de jeunes grimpeurs motivés.

Après une première promotion, l’aventure avec un grand A s’invitait dans l’expédition de l’équipe RAP 2017-208 sur l’île de Madagascar, et plus précisément sur les parois du Tsaranoro. Deux ans de formation qui se sont achevés en beauté avec l’ouverture d’une grande voie en 7c+ max sur le Tsaranoro Atsimo. Une belle réussite collective pour six jeunes venant à bout de l’ouverture toujours incertaine d’une grande voie à l’autre bout du monde. En 2019 une nouvelle équipe était sélectionnée : c’est celle qui est partie en Jordanie début février. Objectif : l’ouverture, si possible, d’une grande voie sur le Djebel Rum. 

La magie du Wadi Rum. ©Gaël Bouquet des Chaux

Solène Amoros dans L5 en 7c+ ©Gaël Bouquet des Chaux

Perdus dans un océan de grès, L3 en 7c+. ©Gaël Bouquet des Chaux

Encadrés par les guides Jonathan Crison et Arnaud Petit, avec le soutien de Gaël Bouquet des Chaux, guide et caméraman, l’équipe s’est lancé en Jordanie dans un (gros) chantier. Car la face Est du Djebel Rum a beau être à vingt minutes du village, elle n’en est pas moins impressionnante avec ses grands murs orange et noir, lisses d’apparence.

Un véritable bigwall dont l’inconnu n’était pas le moindre, à savoir la qualité du rocher, qui, dans le Wadi Rum, va du sublime (souvent) à l’abominable (en sable). L’objectif était d’équiper la voie pour pouvoir franchir des zones complètement dénuées de possibilités de protection naturelle, mais le challenge était réel, avec à chaque longueur ses interrogations.

Il s’agit de donner des billes aux jeunes dans toutes les disciplines de l’escalade, et pas seulement en bloc ou falaise. Jonathan Crison.

 

Fort d’une petite quinzaine de voyages et de grandes ouvertures, Arnaud Petit connaissait le potentiel de la paroi mais tout restait à faire. Et surtout à apprendre : ouvrir du bas avec une perceuse au baudrier, hisser les sacs, bivouaquer en paroi. Coach et formateur de l’équipe, Jonathan Crison explique l’objectif du programme Roc Aventure. « Il s’agit de donner des billes aux jeunes dans toutes les disciplines de l’escalade, et pas seulement en bloc ou falaise. C’est donc vers ce qu’ils ne savent pas faire tous seuls que l’on s’est tournés : dans la performance en grande voie, et/ou dans l’ouverture, qui est encore un domaine à part ».

Jonathan précise que c’est le double projet du RAP avec cette ouverture, ou encore le stage précédent, qui a consisté à rééquiper une falaise – et former les jeunes à l’équipement : « c’est un cadeau pour eux, mais c’est aussi leur donner l’idée d’être acteurs eux-mêmes dans le monde de l’escalade ». D’où ce stage de rééquipement dans les Pyrénées, sur la falaise d’Arguibelle. Fort de cette expérience – au service de la communauté – l’équipe RAP pouvait faire ses sacs pour Wadi Rum… et ce vieux projet imaginé par Arnaud Petit.

Arnaud Petit. ©Gaël Bouquet des Chaux

Bivouac sur la vire de L8 ©Gaël Bouquet des Chaux

Solène Amoros dans L6 déversante en 7c+. ©Gaël Bouquet des Chaux

 C’est la face qui domine le village. Il y a d’autres voies, mais aucune en plein milieu. C’est une ligne qui fait sûrement un peu peur.

Guillaume Colin heureux, L4 en 7a+ ©Gaël Bouquet des Chaux

Éline le Ménestrel. ©Gaël Bouquet des Chaux

Guillaume Colin dans la 2eme long en 7a+. ©Gaël Bouquet des Chaux

« C’est la face qui domine le village, il y a d’autres voies mais aucune en plein milieu. C’est une ligne qui faisait sûrement un peu peur » raconte Jonathan. « Nous avons passé environ onze jours à ouvrir cette voie de 450 mètres, et à l’équiper ». Chaque jour, une cordée avec l’un des deux encadrants se lançait dans une nouvelle longueur, tandis que l’autre cordée découvrait les classiques du coin ou se reposait. Car ouvrir dans le grès de Rum se mérite, les parties surplombantes de la voie étaient des inconnues totales.

Comment un guide et formateur gère-t-il l’engagement nécessaire ? « Il y a forcément des moments où on laisse la bride, mais il faut le bon dosage, trouver le bon équilibre entre se mettre une frayeur et la réussite d’un passage à l’ouverture ». Le meilleur ? « Toutes les longueurs ont été libérées, sans qu’un seul passage d’A0 ne soit nécessaire. Et puis l’équipement ensuite consolidé permettra à cette voie d’être un beau challenge pour de futures cordées. » Toujours cette idée de partage et de transmission. Y compris autour de l’escalade en elle-même, comme cet inoubliable bivouac au huitième relais. « Un souvenir fantastique, et improbable car sur une vire invisible aux jumelles » témoigne Jonathan.

C’est un travail d’équipe. il faut être conscient des risques, gérer la fatigue jour après jour. Éline Le Ménestrel.

Et les stagaires, qui financent pour un tiers eux-mêmes le voyage, qu’en disent-ils ? Pour Éline Le Ménestrel, c’est une expérience exceptionnelle. « On est une équipe très soudée, très homogène. Mais c’est la première fois que j’avais conscience d’une gestion du risque aussi cruciale » raconte Éline, qui outre son expérience de falaisiste a fait le Nose à El Capitan en 2018. « Si tu fais une erreur, si tu fais tomber une grosse écaille sur les copains dessous, ou si tu mets un goujon pas valable, ça engage l’ensemble de l’équipe. Donc il faut que chacun donne le max, et fasse attention. Être conscient des risques, gérer la fatigue… »

Ses souvenirs les plus marquants ? « Quand je suis partie ouvrir la troisième longueur, en dalle, sans savoir où ça passait bien sûr, et que ce serait l’une des longueurs clés en 7c+ ».. Mais le moment le plus fort de cette ouverture pour Éline, c’est « réussir à passer là où on l’avait imaginé dans la onzième longueur.On avait repéré deux grands trous, entre lesquels on imaginait passer en regardant aux jumelles depuis le bas. Je me suis retrouvée sur ce pont de rocher avec un gaz de malade, et c’est bien le passage qu’on avait imaginé depuis le village. Magique ! »

©Gaël Bouquet des Chaux

Romaric Gefroy à l’ouverture, un plat dans la main gauche, la perceuse main droite. ©Gaël Bouquet des Chaux

Jebel Rum. ©Gaël Bouquet des Chaux

L’équipe RAP – FFME 2019-2020 :

Éline Le Ménestrel – Solène Amoros – Thomas Meignan – Romaric Gefroy – Eloi Peretti – Guillaume Colin

Coachs : Jonathan Crison. Arnaud Petit.

Romaric ©Gaël Bouquet des Chaux

Éloi. ©Gaël Bouquet des Chaux

Éline. ©Gaël Bouquet des Chaux

Arnaud. ©Gaël Bouquet des Chaux

* la voie du Coeur.

Jonathan. ©Gaël Bouquet des Chaux

Guillaume. ©Gaël Bouquet des Chaux

Solène. ©Gaël Bouquet des Chaux

Thomas. ©Gaël Bouquet des Chaux