fbpx

À chacun sa panthère

Les larmes de Munier m’ont fait réfléchir. Dans le film co-réalisé avec Marie Amiguet, le photographe animalier traque la panthère des neiges avec un Sylvain Tesson dans le rôle du candide (de l’affût), lui d’habitude plus habitué à enfourcher le tigre en envoyant ad patres ses contemporains.

Après des années à photographier les animaux les plus rares (loup arctique, ours), après bien des aubes blêmes, leurs culs gelés à 4000 mètres sur les plateaux tibétains, la rencontre a lieu. Face à la panthère, Vincent Munier ne peut retenir des larmes de couler sur ses joues. Non pas pour ce qu’elle représente – le Graal animalier – mais pour ce qu’elle est : la beauté du monde.

©JC

Chez Alpine Mag, parler de montagne ne se résume pas à raconter sa beauté. Ses enjeux sont aussi importants, la vérité si tant est qu’elle existe n’est pas un gros mot. Mais cette beauté du monde – celle que raconte Munier dans son film – nous est plus que jamais nécessaire. Les parallèles entre les difficultés rencontrées dans la quête de la panthère et celles de notre impossible quiétude sont nombreux. La première d’entre elle est celle rappelée par Tesson au début du film : il n’y a aucun moyen de garantir celle-ci – la venue de la panthère, comme celle-là-  vivre dans un monde apaisé, sans virus, sans avalanche de mauvaises nouvelles le lundi matin.

Cultiver l’opportunité aussi incertaine de la beauté que d’être convaincu de son existence

Alors bien sûr, tout le monde n’a pas la chance d’aller oublier les méfaits du monde au fin fond du Tibet. Encore moins de vivre avec ce seul souci. Mais je sais, comme toi, au fond de moi, que cette beauté existe, sur une arête qui s’effiloche dans le ciel, dans une forêt où crissent les pas dans la neige, sur une cime entrevue dans un livre ou sur la toile, dans la fraternité d’un bivouac, cette beauté existe dans la promesse de la montagne, et de l’aventure. Il s’agit de s’en souvenir et mieux que cela : d’entretenir l’envie de cette beauté du monde.

Cultiver l’opportunité aussi incertaine de la beauté que d’être convaincu de son existence.

Bonne année 2022.

 

 

 

 

 

* le titre de cet édito est un clin d’oeil à Christine Janin (première française à l’Everest) et à son association A chacun son Everest qui aide et accompagne les femmes et les enfants touchés par la maladie.