fbpx

Solo express au pilier sud des Écrins pour Paul Bonhomme

La vidéo

Nouveau solo express dans le massif des Écrins : au même moment que Benjamin Védrines effectuait sa traversée record de la Meije, Paul Bonhomme avalait le pilier sud des Écrins, une course TD de 1300 mètres en 4h34 du Pré de Madame Carle au sommet de la Barre, 4102 mètres. Il bouclait cet aller-retour en 6h38, en solitaire, sur une grande voie qu’il ne connaissait pas.

Sans doute l’important pour Paul Bonhomme n’est pas l’horaire. Sans doute a-t-il raison de dire, cette fois, que « l’horaire n’est pas un but en soi« . Malgré des années dans les Hautes-Alpes, le guide désormais basé en Haute-Savoie ne connaissait pas le pilier sud de la Barre des Écrins. C’était une bonne raison d’y aller.

Le 27 juillet, Paul Bonhomme a quitté le Pré de Madame Carle, remonté la moraine du glacier Noir en une petite heure avant de se lancer dans le pilier sud des Écrins. Trois heures après avoir démarré la voie de 1300 , il atteignait le sommet du massif. Heureux.

Pilier sud express

Ne pas connaître une montagne, ce n’est pas la même démarche que de courir dans une voie connue, ce n’est pas mieux ou moins bien, c’est différent. En l’occurence, son horaire de trois heures dans la voie – soit 450 mètres par heure en moyenne – a surpris Paul Bonhomme lui-même, qui avait emmené de quoi voir venir. Son sac ? « Huit à dix kilos« , explique-t-il. « J’avais pris trop de friends, trop de bouffe, une corde trop longue… mais je pouvais du coup redescendre si ça n’allait pas, passer une nuit là haut si jamais … bref quand on connaît pas, on anticipe toujours ce qui pourrait ne pas bien se passer ! » Et tout s’est (très) bien passé : 4h38 pour aller au sommet depuis le parking, 6h38 pour la boucle. 

La Barre des Ecrins à droite, avec son évident pilier sud, vu depuis le Glacier Noir. ©Jocelyn Chavy

La face sud des Écrins au pas de course

Quand on regarde l’historique de cette grande paroi des Écrins, on s’aperçoit qu’elle a attiré les alpinistes solitaires. Le premier, et sans doute le plus grand d’entre eux, est un certain Eddy Stofer, l’auteur des cannelures du même nom en face sud de la Dibona : en 1931, Eddy Stofer signe la troisième ascension et la première solitaire du versant Sud des Ecrins par l’arête Rouge, une ligne parallèle au pilier sud, aujourd’hui peu fréquentée. C’est sans doute l’une des plus grandes ascensions d’avant-guerre en solitaire, certes moins technique mais aussi engagé et plus long que le solo futuriste de Emilio Comici à la Cima Grande di Lavaredo en 1937.

Gravi en 1944 par le couple Jean et Jeanne Franco, le pilier sud des Écrins voit son premier solitaire en 1961 : Paul Luquin met 5 heures pour grimper le pilier. En 1989, c’est un certain Christophe Moulin qui met les bouchées double : il enchaîne la voie Chapoutot en face nord du Pic Sans Nom et le pilier sud des Écrins en 10h30, dont 4h30 pour ce dernier. Un sacré enchaînement, qui a marqué Christophe Moulin puisque le mois de janvier suivant (1990) il retourne faire la Chapoutot en solitaire hivernale…

En 1989 Christophe Moulin enchaîne la voie Chapoutot en face nord du Pic Sans Nom et le pilier sud des Écrins en 10h30

Finalement, c’est l’état d’esprit de Paul Bonhomme qui le distingue : il n’avait pas reconnu la voie et souhaitait simplement se faire plaisir.

Sans doute capable d’être encore plus rapide, Paul Bonhomme s’est offert une parenthèse personnelle au milieu de sa saison de guide, un solo express au pilier sud des Écrins avec la satisfaction d’avoir (bien) grimpé. Dans des passages de 5+ à vue, et surtout des sections en rocher médiocre qui font le sel de cette ascension, avec un sac à dos pas bien léger contenant entre autres une corde de 60 mètres (au cas où), et, parmi d’autres vivres, « du saucisson et du coca« .

Ça y est, on trouvé un point commun entre Paul Bonhomme et nous.