C‘est un ovni. Un solo de canyon, mais à la montée, ce qui s’appelle Sawanobori en japonais, l’art de remonter les rivières à leur source. Toru Nakajima fait une fixette sur les cascades de Shomyo, au Japon. L’année précédente, Toru a ouvert la voie depuis le bas, avec James Pearson, Caro Ciavaldini et Yuji Hirayama. La beauté envoûtante de ces quatre grandes cascades successives de ce canyon n’a d’égal que l’humidité du rocher. Et encore, comme si se prendre des seaux d’eau littéralement sur la tête dans un passage ne suffisait pas, il s’agit de grimper des sections couvertes de mousse ou en rocher carrément pourri.
On pourrait dire que ce solo est donc une performance, au sens artistique du terme, une conquête inutilement dangereuse, une performance de Body Art où l’artiste se sert de son corps comme support unique de son expression, à la Lukas Zpira (lecteurs de moins de treize ans, ne googlisez pas ce nom). Contre toute attente, doté d’un moral de samouraï et de chaussons qui ne zippent pas, Toru réussit l’ascension en solo de ce monument de rocher mouillé (d’où la question, pourquoi écrire « attempt » – tentative – dans le titre ?). La prochaine fois que vous avez les mains moites dans une voie parce que le sac à magnésie est vide, pensez à Toru Nakajima… Comme disait Livanos, il n’y a pas de mauvais rocher, il n’y a que des mauvais grimpeurs. Mais lui ne grimpait pas, en plus, sous les claques dignes de l’océan d’un canyon en furie.