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Echecs magnifiques

Je ne sais pas si c’est notre époque qui veut ça, mais il semblerait que les winners n’aient plus la cote. Dans une société où les « premiers de cordée » parlent beaucoup, on pourrait vite se lasser du message de gagne répété à toutes les sauces.

Les injonctions sont nombreuses : il faut « vivre ses rêves plutôt que rêver sa vie » selon les coachs, oser des « expériences » en marketing, s’épanouir toujours plus personnellement et vite s’il vous plait, en véritables entrepreneurs de nos vies personnelles, sans oublier de « sortir de sa zone de confort » ! C’est la start-up nation tous azimuts.

©Ulysse Lefebvre

Et puis il y a ces histoires qui fleurent bon la réalité, la vraie vie comme on dit, incarnées par ceux qu’on aurait appelés « anti-héros » il y a quelque temps mais qui sonnent terriblement juste aujourd’hui. C’est ce qui transpire d’un livre comme Une histoire d’échecs, de Victor Saunders, au sous-titre explicite : La vie chaotique d’un alpiniste. Dans ce livre de montagne, point de sommets. Juste des histoires d’ascensions avortées. Une somme d’aventures hautes en couleurs, teintées d’humour british, qui rendent son auteur terriblement humain. Serait-ce surtout de cette humanité dont nous aurions besoin ?

Regardez le succès d’un film comme Pathan, réalisé par Guillaume Broust en 2019. Ou comment l’histoire d’une expé ratée au Pakistan a captivé les foules et raflé un paquet de prix du public. Et que dire de ce petit livre savoureux intitulé Les ratés de l’aventure, écrit par Bruno Léandri, et qui rappelle que derrière tout grand explorateur, il y a aussi un maladroit, un gaffeur, parfois un balourd, toujours des loupés et des expés foirées.

Parfois, se casser la gueule a du bon

Le droit à l’échec est un puissant moteur de confiance en soi. Parfois, se casser la gueule a du bon. Les ratés devraient être plus souvent montrés, décortiqués, valorisés. C’est toute la force de l’expérimentation et d’avancer à tâtons. D’ailleurs, dans les moments d’errance en montagne, je repense souvent à ce nom de voie au mont Peney, au-dessus de Chambéry : « Le doute s’améliore ». Puis à l’inépuisable Audiard : « Un con qui marche va plus loin qu’un intellectuel assis. » Rassurant. Et je me remets en route.