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Pierra Menta été | Du Népal au Grand Mont

©UlysseLefebvre

Il y a des histoires qui ne s’inventent pas. Comme celle de courir une course aussi technique que la Pierra Menta été sans un mot, avec un inconnu rencontré la veille et qui ne parle pas la même langue. Puis de monter sur le podium. C’est l’histoire de Léo Rochaix et Bhim Gurung, emmené par la légende du trail Dawa Sherpa lui-même. Du Beaufortain à l’Himalaya, il n’y a qu’un pas.

Ils sont près de 300 coureurs à s’inscrire en quelques heures à la Pierra Menta été, chaque début juillet depuis quatre ans. La Pierr’, c’est depuis longtemps la célèbre course de ski-alpinisme qui a lieu sur les sommets d’Arêches, dans le Beaufortain. Une course connue pour son parcours technique et alpin, en binômes et pendant 4 jours. Depuis 2015, le Grand Mont voit passer des coureurs en baskets sur ses crêtes. Ce sera le cas du 6 au 8 juillet prochain, pendant trois jours de course exigeante, parfois avec le baudrier, pour avaler du dénivelé. Autant dire que les concurrents se préparent longtemps à l’avance. Une préparation physique certes, mais aussi d’équipe afin de caler les moindres détails matériels, la stratégie, les options, le parcours. Mais parfois, il faut aussi savoir laisser place à l’improvisation.

Au départ du premier jour de la Pierra Menta 2017. ©Ulysse Lefebvre

Remplacement Last Minute

Local de l’étape, comme Beaufort en compte beaucoup, Léo Rochaix (26 ans), court la Pierra Menta hiver depuis plusieurs années. Il s’est naturellement inscrit à la version estivale, dès sa première édition, remportant des étapes et montant sur la seconde marche du podium en 2015. Lors de la dernière édition, en 2017, Emilien Bochet, son ami d’enfance et compagnon de course habituel, se blesse à la cheville. À une semaine de la course, Rochaix se retrouve sans partenaire. Comme souvent dans les courses à l’ambiance familiale, ce pépin arrive aux oreilles de l’organisation, qui va tenter de trouver un remplaçant. « C’est forcément une déception quand tu perds ton partenaire. Tu t’entraines pour une course très particulière. Nous on y allait clairement pour gagner. » se souvient Léo Rochaix. Mais cette année là, la course beaufortaine accueille une légende du trail mondial, venue du Népal s’il vous plait : Dawa Sherpa.

La course beaufortaine accueille une légende du trail Dawa Sherpa

Léo Rochaix et Bhim Gurung, sur l’arête du Grand Rognoux (2364m). ©Ulysse Lefebvre

Vainqueur du premier UTMB en 2003, Dawa court toujours mais oriente désormais son énergie sur l’organisation de courses locales au Népal ou des projets humanitaires. Mais il aime aussi se lancer dans des courses particulières, qui lui plaisent pour leur caractère : « J’ai particulièrement apprécié les parcours, faits de rapides enchainements de montées et descentes, similaires à ce qu’on pourrait trouver sur des courses au Népal » explique-t-il après trois jours de course, en se classant 22e au général. Le Népal, c’est justement là-bas qu’il repère Bhim Gurung et ses performances en trail-running. Bhim est déjà venu une fois en Europe, pour courir la Kima. Le coureur originaire de Gorkha au Népal gagne la course italienne et bat même le record de Kilian Jornet, svp. « Un ami m’a dit qu’un jeune coureur cherchait un coéquipier. J’en ai parlé à Bhim qui a tout de suite accepté » explique Dawa. « Je suis un skyrunner, ce qui veut dire que je cours rarement plus de 4 ou 5 heures, de préférence sur de gros dénivelés. La Pierra m’a semblé parfaite pour mon profil » se souvient Bhim.

Dawa Sherpa & Bhim Gurung, après la Pierra Menta été 2017. ©Ulysse Lefebvre

Dernier jour de course et sprint final sur Roche Parstire (2109m). ©Ulysse Lefebvre

Bhim Gurung sur la crête du Grand Rognoux (2364m). ©Ulysse Lefebvre

La Pierra Menta été a un profil que tu ne retrouves pas ailleurs

« On se comprend dans l’effort »

Veille de Pierra Menta été. Un Savoyard et un Népalais se rencontrent pour la première fois. Ils vont vivre une course étonnante, marquée par le silence et la compréhension implicite : « On a couru un peu ensemble la veille de la course. Notre anglais n’est pas terrible et il a fallu se parler par gestes. Mais dans l’effort, on se comprend ». Pas compliqué Léo Rochaix. Il a quand même pris le temps de regarder le parcours de son nouveau coéquipier sur internet : « Je savais qu’il serait très fort en fin de course. J’ai donné le rythme en montée en début de course puis il m’a aidé dans les descentes, en prenant mes bâtons, et dans les derniers dénivelés, avec l’élastique. » Et ça marche. Bhim et Léo remportent l’étape symbolique du Grand Mont et montent sur la 2e marche au classement général. « La Pierra Menta été a un profil que tu ne retrouves pas ailleurs. Les montées et descentes s’enchaînent sans replats, ce qui convient bien à mon tempérament de skieur-alpiniste » explique Léo, a fortiori avec un coureur venu de l’Himalaya. Cette année, Dawa et Bhim ne seront pas sur le départ. Ce dernier vient de courir et remporter l’Everest marathon. Léo, lui, sera bien présent avec Emilien Bochet et comptent bien laisser leur marque sur le podium. À leurs côtés, près de 13 nationalités différentes donneront une dimension internationale à une course profondément ancrée dans son Beaufortain local.

Bhim & Léo à l’arrivée du premier jour de course (3e place), autour du Mirantin (2460m) et de la pointe de la Grande Journée (2460m). ©Ulysse Lefebvre