Everest : 16 mai 1975, Junko Tabei première femme sur le toit du monde

©Coll. Junko Tabei

Il y a cinquante ans tout juste, le 16 mai 1975, Junko Tabei devenait la première femme à atteindre la cime de l’Everest. Vingt-deux ans – une éternité – après la première cordée masculine – au sommet, la Japonaise inscrivait son nom dans l’histoire grâce à une ténacité hors du commun. 

La Japonaise Junko Tabei a failli ne pas être la première femme à atteindre l’Everest, et même, a failli ne pas en revenir. Le 4 mai, douze jours avant qu’elle ne réussisse, l’expédition féminine japonaise campe dans la combe ouest, et redescend d’une rotation à 7900 mètres. Son camp 2 est situé à 6300 mètres quand une avalanche balaye le camp et ensevelit les tentes. Dont heureusement les Japonaises et les sherpas parviennent à s’extraire sans victime. Le reste appartient à l’histoire. Mais remontons le temps.

Née en 1939, dans la province de Fukushima, Junko Tabei fait son premier sommet à l’âge de dix ans lors d’une sortie scolaire. Elle se passionne pour les montagnes japonaises et fonde en 1969 le Ladies Climbing Club (LCC). Ce club d’alpinisme féminin est bien entendu le premier au Japon, mais aussi l’un des premiers au monde. Avec son mari elle gravit le mont Fuji, relativement facile, puis s’intéresse aux sommets lointains.

En 1970 une première grande expédition au Népal conduit Junko Tabei et le LCC au sommet de l’Annapurna III, 7555 mètres, que Junko et sa comparse Hiroko Hirakawa sont les premières à atteindre. La voie vers l’Everest est semé d’embûches, dans une société et surtout à une époque où, comme le dira Junko Tabei, la place de la femme japonaise est à la maison, ou, à l’extrême limite, de servir le thé dans les entreprises.

Elle parvient à convaincre la télévision japonaise de soutenir le projet et quinze femmes – dont Junko – s’envolent pour le Népal en mars 1975, avec pour objectif l’Everest par la combe ouest, versant népalais.

AU même moment sur le versant nord de l’Everest se trouve une Tibétaine prête pour l’ascension

Au même moment, sur le versant tibétain de l’Everest, une expédition chinoise, forte de nombreux Tibétains, se prépare aussi. Parmi eux se trouve une femme : Phantog (ou Pan Duo selon certains), une femme tibétaine qui a atteint 6400 mètres quinze ans plus tôt, lors de l’expédition chinoise controversée de 1960. Cette fois-ci, les Chinois sont bien décidés à favoriser l’ascension de Phantog.

Mais c’est sans compter la détermination de Junko Tabei. Malgré le choc de l’avalanche du 4 mai qui a failli mal finir, Junko Tabei prend la décision de poursuivre et de tenter le sommet, avec un sherpa, Ang Tsering, et une deuxième femme, Yuriko Watanabe. Celle-ci est rappelée peu avant pour aider d’autres membres de l’expédition qui sont malades. Et c’est Junko Tabei, femme frêle d’un mètre cinquante deux, qui avec Ang Tsering parvient au sommet de l’Everest le 16 mai 1975. Avec bouteilles d’oxygène uniquement à très haute altitude. La première féminine sans oxygène sera l’oeuvre en 1988 de Lydia Bradey.

©Coll. Junko Tabei

Historique, la première femme au sommet de l’Everest ©Coll. Junko Tabei

Versant tibétain, un accident dramatique a endeuillé l’expédition. Le départ vers le sommet a été retardé. Mais les Chinois, et Tibétains, ne renoncent pas. Onze jours après l’ascension historique de Junko Tabei, la Tibétaine Phantog devient la deuxième femme à atteindre le Toit du monde. 

Junko Tabei a été la première femme à l’Everest onze jours avant la seconde, la tibétaine Phantog

Une longue et fructueuse carrière

Au-delà de son ascension historique, Junko Tabei va marquer son époque en devenant en 1992 la première femme à avoir gravi les fameux Seven Summits sur les sept continents. Mais surtout, sa passion pour le voyage, la découverte et l’alpinisme l’a conduit sur de nombreux sommets sur tous les continents. Elle a aussi gravi le Shishapangma (en 1981), et trois 7000 (dont le pic Lénine et le pic Communisme). En Europe, Junko Tabei a notamment gravi le Cervin, la Dent Blanche. En Asie, elle a écumé les sommets peu connus de Taiwan, mais aussi de nombreux sommets aux Amériques, comme en témoigne sa longue liste de sommets. Elle est décédée d’un cancer en 2006, et a continué de grimper jusqu’au bout.

Âgée de 35 ans et mère d’une petite fille de trois ans lorsqu’elle est partie à l’Everest, Junko Tabei a dû essuyer les critiques des hommes japonais fustigeant son attitude et affirmant qu’une expédition entièrement féminine ne pourrait réussir. Junko Tabei a su leur donner tort.