Dans le silence glacé du massif des Écrins, les deux alpinistes Boris Pivaudran et Simon Martinet viennent de répéter le Prestige des Écrins en face nord du Pic Sans Nom, en une journée de 20 heures. Une voie de 1000 mètres (M6+) ouverte en octobre 2015 par la cordée Degoulet-Joly-Brochard et peu répétée : on se souvient de la première à la journée par Benjamin Védrines et ses compagnons. Entre placages éphémères et rocher compact aux protections rares, ils se sont immergés dans cette grande ascension hivernale qui résonne par son engagement comme une expédition lointaine, mais à domicile. Voici le récit de Boris.
Chaque hiver, de novembre à avril, la vallée d’Ailefroide se retrouve coupée du monde civilisé. Prisonniers de leur gangue de neige, le village et les vallons menant aux grands sommets du Parc national des Écrins sombrent dans un silence glacé. Seuls quelques skieurs-randonneurs épris de solitude s’attaquent aux dix kilomètres de route enneigée pour atteindre le Pré de Mme Carle.
Il y a deux siècles, les glaciers blancs et noirs se rejoignaient dans ce grand marais d’altitude. Aujourd’hui, ils se sont chacun recroquevillés 500 mètres plus haut dans leur nid, comme deux couleuvres piquées par les assauts du monde moderne. Pourtant, gravir le glacier noir avec nos sacs lestés du matériel nous arrache de ce monde civilisé : plus de réseau, plus d’âme qui vive. En hiver, cet endroit semble encore plus reculé. Ayant renoncé aux voyages lointains depuis des années, j’y retrouve
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