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Pic Nord des Cavales, arête ouest

Les plus belles courses d'Alpine

Sur l'arête ouest du Pic N. des Cavales, sur fond de Râteau et Meije. ©JC

Bon rocher, panorama époustouflant au sommet, le Pic Nord des Cavales 3363 m. jouit d’une situation enviable au coeur des Écrins. L’arête ouest (ou O-S-O) est un itinéraire classique, une très belle escalade avec une vue imprenable sur la face sud de la Meije. Le bonus ? Zéro glacier, zéro problème. 

C‘est à la fois un atout, et un inconvénient pour le Pic Nord des Cavales : quand on remonte la vallée des Étançons, les yeux se focalisent sur la Meije, sa voie extra-normale signée Gaspard et son immense muraille sud. Il suffit pourtant de tourner le regard de trente degrés à droite pour voir un beau sommet pointu. Un pic dont l’arête aérienne, bien visible, l’arête ouest donc, aurait hérité du qualificatif de spigolo si elle avait été ouverte dans les années cinquante par des grimpeurs de retour des Dolomites. Point du tout ! L’arête ouest est l’oeuvre de grands connaisseurs du massif des Écrins, en 1933 : les frères Berthet, encordés avec le guide Henri Turc. Berthet dont au moins un a sévi à la Dibona non loin de là. La ligne est élégante : deux ressauts raides, séparés par une tranche d’arête horizontale. Et la promesse d’un excellent rocher, à quelque exception près.

Depuis le Châtelleret, l’arête ouest du Pic Nord des Cavales découpée par l’ombre sur le premier ressaut. ©JC

Sous la reine Meije, le Châtelleret. ©JC

Devant la Meije, l’arête ouest du Pic Nord des Cavales se découpe dans le ciel. ©JC

©JC

Il y a deux écoles pour gravir l’arête ouest du Pic Nord des Cavales. Partir du refuge du Châtelleret, ou partir du refuge du Pavé. Du Châtelleret, vite atteint la veille, la marche d’approche est tout ce qu’il y a de longuette, en direction du col du Clot des Cavales, sentier puis un peu de crapahut avec final dans un tas de blocs. Sur le papier, l’approche depuis le refuge du Pavé (lui-même fort éloigné) paraît être une bonne idée : une petite heure de marche, puis la descente versant ouest pour atteindre le pied de l’arête. Mais la descente ne passe plus par le col du Clot des Cavales, sans neige, devenu couloir de terre. Une descente a été équipée par la brèche du Grand Dièdre, en amont sur l’arête sud : un passage que l’on emprunte soit en début d’après midi pour revenir versant Châtelleret, soit au petit matin pour accéder au versant ouest depuis le Pavé. Et franchement, pas sûr que cette descente qui finit dans des vires sous la face ouest, vires faciles mais exposées, soit une bonne idée de bon matin ! Sauf à connaître bien sûr. 

Avec les chaussons, c’est mieux.

Charles Romero, le gardien du Châtelleret, prévient gentiment les cordées : l’arête ouest, c’est 12h à 14h refuge-refuge, tout de même. Ce n’est pas si court, cette affaire ! Une fois l’approche expédiée, les premiers passages faciles de l’arête itou, il faut se réveiller un minium pour gravir le premier ressaut : du IV et du V avec la seule longueur en rocher moyen de la voie, puis une longueur superbe mène à une petite dalle suspendue, un 5+ dotée de 3 pitons ! Autant dire que si la voie passe en grosses, on ne saurait trop vous conseiller de ne pas oublier les chaussons, qui, comme à Sialouze par exemple, font merveille, et à mesure que l’on s’élève, sur le granit rond de certaines cannelures… Entre les deux ressauts l’arête facile a le bon goût de se remonter corde tendue, le cou dévissé vers la magnétique face sud de la Meije.

Devant la Meije ©JC

Dans la longueur-clé du second ressaut ©JC

Revival fluo sur fond de Grande Ruine et Pic Maître ©JC

Il ne reste plus qu’à gravir, au soleil, le second ressaut, en superbe rocher. Quelques longueurs en 5 méritent de l’attention, puis une série de couloirs mène au Pic Nord des Cavales, 3362 m. Un sommet gravi pour la première fois par Pierre Gaspard et fils en 1883, par la face Est, six ans après leur première magistrale de la Meije. Eux n’avaient pas exactement cette vue : le couloir du Diable et la face nord de la Grande Ruine étaient garnies de neige et de glace, alors qu’ils sont secs aujourd’hui. Les montagnes alentour ont changé. Mais pas le Pic Nord des Cavales, impeccablement situé au coeur des Écrins. Il ne reste plus qu’à descendre la courte arête sud, la brèche du Grand Dièdre, et le long pierrier puis sentier final pour atteindre les Étançons. Et voir sur la montre qu’avec dix heures et quelque de course sans les pauses, le gardien n’avait pas tort.

Écrins, Pic Nord des Cavales, arête ouest-sud-ouest.

D+, 500 m, 5b max.

 

Accès Depuis la Bérarde, monter au refuge du Châtelleret, FFCAM, 2h. Le refuge ferme mi-septembre. Eau à proximité. Possibilité d’accéder depuis le refuge du Pavé (4h30 depuis le Villar d’Arène), ouvert jusqu’à fin septembre, et basculer par la brèche du Grand Dièdre.

Approche Du Châtelleret, redescendre rive gauche du vallon pour trouver le sentier qui monte au col du Clot des Cavales, en franchissant une série de barres rocheuses vers 2550 m. Vers 2800 mètres, se diriger vers la base de l’arête ouest. On peut aussi accéder par le Pavé, et descendre versant Châtelleret par les rappels de la brèche du Grand Dièdre. Mais sans connaître les lieux, cette solution alléchante (puisque abrégeant la descente au retour) paraît moins convaincante que l’approche certes longue mais évidente depuis le Châtelleret.

Itinéraire Suivre Monter sur l’arête, suivre celle-ci versant Meije et atteindre le pied du premier ressaut, que l’on remonte d’abord par une fissure raide en rocher gris et fracturé, quelques blocs instables, puis sur du bon rocher versant Meije à nouveau, rampes et fissures rondes. L’un des passages-clés est ici : une courte dalle en 5/5+ bien protégée. Faire relais au pied de celle-ci évite le tirage. Au-dessus, l’arête horizontale se prête bien à la progression en corde tendue. Au pied du 2nd ressaut, qui se grimpe bien à droite, traverser une quinzaine de mètres à droite et repérer un piton et un système de cannelures, que l’on remonte en deux longueurs en tirant progressivement à gauche. Une fois sur le fil, une longueur délicate en 5 mais bien équipée permet de sortir de la partie raide. Il ne reste plus qu’à gravir en corde tendue les 80 derniers mètres plus faciles.

Descente arête sud puis brèche du Grand Dièdre Du sommet, désescalade, puis deux à trois rappels de 25 mètres déposent sur une vire. La suivre à droite puis à gauche (en regardant le vide), un petit pas mène à un trou ceinturé de sangles. Un rappel oblique ou désescalade permet de contourner l’obstacle par la droite et atteindre le relais versant Pavé. Un rappel de 50 mètres dépose au pied des rochers. Pour revenir versant Étançons : traverser plus bas à main droite et remonter à la brèche du Grand Dièdre. Rappels équipés sur chaînes par les guides. 4×25 ou mieux, tirer un rappel de 2×50 sur le dernier relais pour descendre dans un couloir dièdre encombré de pierres. Traverser sur des vires, descendre à droite pour atteindre le pied des voies Cambon de la face ouest (La Fureur de Vivre, etc). De là on rejoint la moraine et le sentier d’accès.

Matériel
Corde 50 m (rappels de 25 m) possible, mais un deuxième brin léger (ou 2×50 m) dans le sac à la montée est très recommandé, cela permet de faire des plus grands rappels à la descente, notamment le dernier de l’arête sud. Prendre 6 dégaines, et 5 à 6 camalots jusqu’au numéro 2 (prendre plus de coinceurs selon l’aisance). Grandes sangles très utiles sur les becquets.

Topo
Numéro 51 des Cent Plus Belles Courses des Écrins de Gaston Rébuffat (Denoël).

Première ascension 16 août 1933, Georges, Henri et Maurice Berthet, Henri Turc.

Conseils
– Progression en corde tendue sur le début, l’arête entre les deux ressauts, et la fin. Premier ressaut : 4 à 5 longueurs à tirer, second ressaut : 3 à 4 longueurs à tirer, le reste à faire en corde tendue.

– l’approche fait 650 m. La course fait 500 mètres. Pitons en place dans les deux ou trois longueurs en 5. Globalement peu de matériel en place mais terrain facile à protéger, bonnes fissures. Chaussons conseillés.

Guides

Bureau des guides Meije Écrins

 

 

Pic Nord des Cavales. L’arête ouest (en jaune) à gauche, descente par l’arête sud à droite et la brèche du Grand Dièdre (flèches rouges) et vires. ©JC