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Brèche Puiseux : le ski face aux Grandes Jorasses

LES PLUS BELLES COURSES D'ALPINE (avec Hélias Millerioux)

Dernières lueurs sur les Périades et la brèche Puiseux. ©Ulysse Lefebvre

La Brèche Puiseux que l’on atteint en traversant la magnifique crête des Périades constitue l’une des plus belles randonnées à ski du massif du Mont-Blanc. Combinant quelques manips d’alpinisme dans un cadre grandiose, c’est un bel objectif pour l’hiver qui arrive. En route, avec Hélias Millerioux pour guide.  

9h du mat’. Pointe Helbronner (3462m). Un horaire déjà beaucoup trop tardif pour Hélias. « Allez allez, on y va ! » Et comment : le haut de la Vallée Blanche est expédié en quelques virages. On n’est pas là pour acheter du terrain…

Avec les Trois Cols, la brèche Puiseux est l’une des randonnées à la journée les plus belles du Mont-Blanc. Depuis l’aiguille du Midi ou la pointe Hellbronner, il s’agit de descendre la vallée Blanche classique avant de basculer rive droite au niveau de la Salle à manger (vers 2400m). Hélias préfère passer par l’itinéraire de vallée Noire, qui coupe plus tôt en rive droite, vers la petite pointe de la Noire (3421m), dans le prolongement de la Dent du Géant (4013m). Un peu plus raide et exposé, il faut être un peu plus à l’aise sur les skis que sur l’itinéraire classique. Cette variante permet de perdre un peu moins de dénivelé et d’entamer la montée à la brèche un peu plus haut. Plus exigeante, cette variante offre aussi de superbes points de vue sur les séracs du glacier du Géant.

Hélias donne le rythme alors que l’on attaque la montée sur le gacier des Périades, vers la brèche Puiseux. ©Ulysse Lefebvre

A la jonction avec le glacier des Périades commence l’ascension. La Brèche se niche 1000m plus haut. Elle n’apparaît qu’en toute fin de montée. Main droite, la Dent du Géant se dévoile sous une face peu connue de ceux qui s’en tiennent au bassin du Géant. Le cadre est grandiose, les flèches de granite se dressent tout autour. Et Hélias court toujours.

Pourtant, l’animal n’est pas du genre collant-pipette-allumettes. Au printemps dernier, il descendait la Nord-est des Courtes avec des Scott Scrapper de 115mm au patin, en 189cm de long. « Je skie essentiellement en 95mm, avec des Scott Super Guide ou des Speed Guide comme aujourd’hui. Ce sont deux paires que j’utilise tout l’hiver quand je bosse. C’est assez large pour la pente raide et plus stable dans les changements de neige. » Autour de nous, il y a du monde et pour cause, la marque Scott, qui soutient Hélias, a organisé un test grandeur nature de sa gamme de skis Superguide mais aussi de ses nouvelles chaussures de ski de rando Freeguide en carbone et la tenue Explorair qui va avec. « Cette marque est incroyable, ils savent tout faire et le font vachement bien »… depuis 60 ans !

 

Le couloir menant à la brèche Puiseux, avec le mont Blanc en toile de fond. ©Ulysse Lefebvre

 ©Ulysse Lefebvre

Au pied du couloir à 45°, on met les skis sur le dos. Quelques rayons de soleil nous parviennent peu à peu. Hélias a la banane et son air débonnaire habituel. « Qu’est-ce que c’est beau, mais qu’est-ce que c’est beau ! » Le guide d’origine parisienne semble toujours reconnaissant envers Dame Nature de lui offrir autre chose que la ville de sa jeunesse. Hasard du jour, c’est un autre Parisien qui ouvrait la voie vers cette brèche à l’été 1925 : Victor Puiseux, accompagné de Robert Puiseux et Gustave-Alfred Couttet. Pas de skis à l’époque mais l’incursion notable d’un génie de « l’astronomie mathématique » (ça existe oui) en quête d’élévation alpine. Puiseux fut notamment rédacteur en chef  de la revue Connaissance des temps ou des mouvements célestes et travailla beaucoup sur Vénus. On voyage en montagne…

Et tant pis si l’on n’est pas les seuls ici-bas à avoir eu l’idée de monter là-haut aujourd’hui. Cela n’empêche pas Hélias de donner un coup de main à mouliner tout ce beau monde dans le rappel de la brèche, versant glacier du mont Mallet. Pour le grand ski, il faudra repasser. En ce début décembre (2019), les conditions de neige ne sont pas encore optimales. Le printemps sera à privilégier pour une descente en neige plus douce et des crevasses mieux bouchées. Mais il sera plus difficile de rejoindre Chamonix à ski. Juste à côté, la face nord des Grandes Jorasses nous surplombe. Changement d’ambiance et vigilance accrue sur ce glacier crevassé.

Arrivée à la brèche Puiseux (3432m). Au fond, l’aiguille de Leschaux (3759m). ©Ulysse Lefebvre

Hélias mouline. ©Ulysse Lefebvre

La nuit tombe vite en hiver, surtout quand on part si tard. Les dernières lueurs nous parviennent alors que l’on rejoint la Mer de Glace par le glacier de Leschaux. Tranquilles, on se laisse glisser tout en discutant sur cette zone plus plane du glacier. Hélias raconte sa descente à ski du mont Logan (5959m) au Yukon, en avril/mai 2019, et de son interminable arête Est de près de 3500m de dénivelé. C’est comme ça le ski : on n’a pas encore terminé une course qu’on se rappelle les anciennes et que l’on imagine déjà les suivantes…

Dernières lueurs sur le dôme de Rochefort et les Périades. ©Ulysse Lefebvre

L’imposante muraille de la face nord des Grandes Jorasses. ©Ulysse Lefebvre

Massif du Mont-Blanc, Brèche Puiseux, 3432m en traversée Ouest-Est
3.3, AD+

Accès 
Depuis l’aiguille du Midi ou la pointe Helbronner, descente par la vallée Blanche ou variante vallée Noire, puis montée à la brèche par le glacier des Périades.

Topos 

Mont-Blanc, les plus beaux itinéraires à skis, Philippe Batoux, Glénat, 2020.
La vallée blanche, plus beau hors-piste du monde, François Damilano, JMEditions, 2009.

Matériel
Corde 2x30m, piolet-crampons pour montée à la brèche si neige dure.