“Peaux de chamois, peaux de phoques, agripettes, ski de fond, skating, ski de randonnée”… Autant de mots employés parfois maladroitement autour de ce premier repas du soir partagé dans un magnifique gîte italien. L’ambiance est au rendez-vous, la chaleur des habitants piémontais se fait sentir et leur cuisine aux milles saveurs nous transporte et comble nos estomacs vides. À skis autour du Mont Viso avec Allibert Trekking et Paul Bonhomme, guide et invité vedette : le voyage s’annonce sous les meilleurs auspices !
Dimanche, 8h50, nous sommes sur le parking de la gare de Briançon, plusieurs groupes Allibert Trekking sont prêts à partir. Je cherche le mien puis, à ma grande surprise, tombe sur Paul Bonhomme, notre guide pour la semaine. Skieur de pente raide, coureur d’ultra, en quête permanente d’aventure, il est un exemple pour beaucoup dans le milieu de la montagne. Quelle chance pour le groupe d’avoir un tel personnage pour nous faire découvrir les alentours du Mont Viso ! Nous échangeons quelques mots et il m’annonce que nous avons un groupe 100% féminin, 6 skieuses, d’âges différents, de générations différentes, et de milieux sociaux différents mais sans doute une passion commune : la montagne et ses grands espaces sauvages. La rencontre est intéressante car seulement quelques-unes d’entre elles connaissent la notoriété de notre chef d’expédition. Mais ici, pas de différence, chacune est venue seule pour profiter de ses vacances et de la glisse que les prochaines journées vont nous offrir.
Lucie doit louer le matériel pour la semaine. Puis après quelques minutes, elle se rend compte que quelque chose cloche, elle entend des termes peu communs. “Peau de chamois”, “ski de randonnée”, “position descente-montée”… “Ok, silence, on verra bien”, se dit-elle.
Ciel bleu ou blanc, le guide est à la trace. ©Christophe Angot
Un guide aux petits soins ! ©Christophe Angot
Les premiers jours, la neige est encore bien soufflée. ©Christophe Angot
Mélèzes et premiers virages
Maintenant au complet et les présentations faites, Paul nous propose une petite rando de mise en jambe non loin de la frontière franco-italienne. Il est 11h et le beau temps est encore présent, c’est parti ! Chacune s’équipe, bavarde et se prépare pour une jolie sortie, direction la « Cima del Bosco » à 2376 m. Les plus aguerries aident les débutantes à fixer leurs peaux de phoques, serrer leurs chaussures et ne rien oublier. En nous remettant notre pique-nique, Paul nous explique les consignes à respecter avant de suivre sa trace.
Ces premières heures à skis permettent à chacune de se tester, prendre son rythme, apprivoiser le matériel sur une pente légère où notre trace sillonne autour des mélèzes, un contexte idéal pour commencer. Quand la pente s’accentue un peu, les souffles s’accélèrent et les discussions cessent. Certaines moins entrainées, d’autres débutantes, Paul impose un rythme qui convient à chacune afin de garder le groupe soudé et éviter les pauses à répétitions. Nous sommes à mi-pente et c’est l’heure d’une petite halte. Quelques heures à peine après le départ, les filles sont ravies et l’ambiance est conviviale et chaleureuse, Paul y met de son humour et le groupe a l’impression de se connaître depuis des années !
Les premiers virages sont timides, chacune tentant de trouver son équilibre et sa glisse au milieu de ce vallon où la neige est très changeante. Notre guide essaie de trouver la meilleure neige et adapte notre allure et le choix des pentes en prenant en considération le niveau du groupe. Le vent, le froid, la chaleur et les dernières précipitations n’ont pas arrangé l’état du manteau neigeux. Nos skieuses se débrouillent très bien et le groupe est plutôt homogène. C’est un bon point pour la suite du périple. Nous voilà de retour à la voiture, le sourire jusqu’aux oreilles après cette descente réussie et ces quelques virages dans la neige fraîchement tombée. Les filles sont rassurées et maintenant confiantes pour la suite. La météo s’est gâtée, le temps de ranger les affaires et les premiers flocons apparaissent. Timing parfait !
Le Mont Viso, habité par les vents. ©Christophe Angot
Point carto et briefing du séjour. ©Christophe Angot
Sergio l’italien
Après quelques heures de route et presque autant de cumul de siestes sur la totalité du groupe, nous voilà à Casteldelfino, bien arrivés dans le Piémont pour les cinq prochains jours ! À première vue, un village dans une vallée encaissée, plutôt froide, peu de vie à l’horizon. La neige fondue s’abat sur le pare-brise. Il fait nuit, et les troupes sont fatiguées. L’ambiance est silencieuse et chacun rêve d’une bonne douche chaude. Mais c’était sans compter sur l’accueil de Sergio, propriétaire du gîte “Il Mulino delle Fucine” où l’on restera pour les deux premières nuits ! Son sourire et son français à l’accent italien réchauffent l’atmosphère et la vision de ce village froid change complètement après quelques secondes. Le charme de ce monsieur nous permet de comprendre rapidement pourquoi nous sommes ici, dans ce gîte. Les chambres sont confortables et très charmantes, temps calme. Les douches terminées, nous voilà rassemblés dans la salle de restauration autour d’un verre. Grâce à Sergio, le poêle à bois et les locaux aux accents incroyables, l’ambiance est chaleureuse et tout le monde attend le repas avec impatience. Enfin… devrais-je dire : les repas ? Retour autour de ce délice aux milles saveurs, un antipasti, puis un deuxième, un plat, puis un autre plat, et encore un autre, chacune des filles se marre et nous n’en voyons plus la faim ! Que dis-je, la fin !
Lucie se livre enfin. Elle nous dévoile comment elle est arrivée ici. Tout d’abord une envie de s’inscrire à une semaine de ski de fond, ce qu’elle croit faire. Puis en lisant les fiches techniques détaillées, elle comprend que le séjour n’a pas l’air exactement comme elle l’imaginait. Elle nous confie que ce matin en louant le matériel, le fait de récupérer des « peaux de chamois » devenues “agripettes” au fil du séjour, lui a bien fait comprendre qu’elle n’était pas là où elle pensait. Aujourd’hui, c’était la première fois qu’elle faisait du ski de randonnée. Enfin du skating pour Lucie… Une anecdote et une maladresse qui la suivront tout au long de l’aventure !
Perdus dans la montagne. ©Christophe Angot
L’art de la trace, unique fil directeur. ©Christophe Angot
Farandole de conversions. ©Christophe Angot
Fraîche et savoureuse
Le lendemain matin, le village est sous la pluie, nous allons petit déjeuner et en un court instant, la pluie se transforme en flocons. La météo n’annonce quasiment aucune éclaircie, mais de fortes précipitations de neige toute la journée. Enfin ! La neige manquait ces dernières semaines et c’est un grand bonheur de voir les arbres se revêtir de leur plus beau manteau blanc. L’excitation se fait sentir et quelques minutes plus tard, tout le charmant village de Casteldelfino est déjà recouvert de neige, son clocher est balayé par le vent, c’est magnifique !
Le groupe est sur-motivé pour aller affronter cette multitude de neige ! Paul nous prévient qu’il a changé de programme au vu des conditions météorologiques qui sont pire qu’annoncées. Les fortes précipitations de ces dernières heures ont considérablement augmenté le risque d’avalanche, il est donc préférable de rester en terrain plus sûr. Direction une forêt de mélèzes majestueuse à pente douce !
Monter à l’abri des avalanches, entre arbres et crêtes. ©Christophe Angot
©Christophe Angot
Seuls au monde à plusieurs. ©Christophe Angot
Les premiers hectomètres nous emmènent au milieu d’un vallon au charme fou. Émerveillées, chacune d’entre nous y va de son commentaire… le plaisir est absolu. Notre ascension sous la neige, parfois dans le brouillard, est accompagnée de bruits assourdissants. Ce sont des avalanches spontanées qui partent de faces plus pentues à quelques kilomètres d’ici ! Paul décide de faire une pause afin de revenir sur les avalanches que nous entendions au loin, et les risques liés aux dernières précipitations. Retour au sérieux, c’est l’heure d’un cours sur la nivologie et les risques. Comment prévoir ? Analyser ? Faire des choix ? Cette dizaine de minutes, rapide mais très efficace, nous rappelle notre place dans ce milieu naturel sauvage où l’on est en train d’évoluer. Dame nature est bien plus forte, respectons là !
Après de longues minutes autour du minibus à débriefer sur la descente extraordinaire que nous venons de faire, entre rire et plaisir de la glisse, nous voilà repartis pour une bonne douche avant un apéro au bar du coin ! L’ambiance de ce bistrot de village est chaleureuse. Paul nous montre la carte du coin et nous explique ses choix pour le lendemain au vu des conditions nivologiques. Les échanges sont très intéressants et les sujets diffèrent. Les filles interrogent Paul au sujet de son parcours, son métier de guide, les risques encourus, la relation avec l’humain, autant de sujets sur lesquels il nous répond avec passion et sincérité. Le groupe se soude et nous sentons qu’une certaine cohésion se met en place malgré les différences entre chacun de nous.
Virage carte postale, un must ! ©Christophe Angot
Freeride et ski de rando peuvent aussi faire bon ménage. ©Christophe Angot
Navigation à vue, jeux de reliefs. ©Christophe Angot
Les jours suivants, notre guide optimise en permanence nos itinéraires en fonction des conditions, du niveau du groupe et de la beauté des paysages ! Et que dire… Chaque journée est merveilleuse, nous avons la chance d’apercevoir la face sud du Mont Viso lors de la troisième journée ensoleillée, un enchantement pour les filles. Par la suite, nous irons à Ostana, de l’autre côté du Mont Viso, au refuge “La Galaberna” dans la vallée du Po. Pas de changement, les paysages sont toujours, voire encore plus époustouflants. Nous sommes maintenant devant la face nord du Mont Viso et Paul nous emmène dans des endroits incroyables. Toute la fin de semaine dans ce nouveau gîte, plus moderne mais tout aussi chaleureux, sera accompagnée d’excellents repas gargantuesques. Mais quel plaisir après avoir passé la journée dehors à se dépenser ! Le refuge est un peu le lieu de rendez-vous du village, un point d’échange et de rassemblement. Des habitants viennent boire un café, une bière, passer un moment, l’ambiance est charmante, tout comme l’accueil de ces italiens passionnés de montagne.
Paul Bonhomme : un bras de fer dans un gant de velours. ©Christophe Angot
La surprise du chef
Lors d’une après-midi, Paul nous a réservé une surprise ! Nous avons la chance d’aller rendre visite à un artisan boulanger du village d’Ostana. La rencontre avec ce passionné est charmante. Au milieu des rires et explications techniques, chacun exprime son talent d’artiste pour créer son pain qu’il dégustera le lendemain. Un bon moment de partage avant la dernière soirée du séjour.
Et quelle soirée ! Les bières et les bouteilles de rouge de la région défilent, les filles se lâchent, rient à tue-tête. C’est le dernier repas tous ensemble et l’ambiance est au rendez-vous ! Chloé, envoyée par Allibert en tant que cliente afin de vendre ce séjour par la suite, lance même un concours de bras de fer ! Grand moment de rigolade quand il faudra 4 bras pour faire tomber celui de notre guide ! Les filles clôturent ce repas en chantant autour du bar, heureusement que nous sommes dans un refuge et qu’il ne faudra pas tarder à aller se coucher ! En riant, Paul me confie qu’il est ravi que le séjour se termine ainsi car c’est la preuve même que tout le monde s’est régalé durant la semaine. C’est aussi ainsi que l’on reconnaît le travail d’un bon guide, n’est-ce pas ?