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Calomnie au mont Blanc : lettre ouverte à Jean-Marc Peillex

Maire de Saint-Gervais-les-Bains

Monsieur le maire,
Un canular. Un mauvais canular. Voilà ce qui m’est immédiatement venu à l’esprit en voyant cette affiche soigneusement mise en page, avec logo en en-tête, titre, texte et photos.
Riche document, triste message.

Une fois n’est pas coutume : nous vous donnions la parole en juin dernier, votre rôle étant moteur dans la concertation et la rédaction en cours d’un Arrêté préfectoral de protection de l’habitat naturel (APPHN) concernant le sommet du mont Blanc et sa voie normale située en majeure partie sur la commune de Saint Gervais. Un document important, que l’on soit d’accord ou pas avec son contenu et ses objectifs. Pour autant, nous n’étions pas dupes, l’été étant votre période de brame médiatique annuel.

Si nous laissons couler la plupart
de vos coups de gueule,
le dernier en date est grave
et doit être vivement dénoncé

Dans le communiqué reproduit ci-dessous (mais dont nous masquons le visage de la personne mise en cause par soucis d’anonymat), vous dénoncez monsieur le Maire un « hurluberlu sur les pentes du Mont-Blanc ». Votre preuve ? Le témoignage d’un membre de l’une des « brigades blanches » qui rapporte qu’un individu s’est « présenté à [leur] cabane sans réservation » et qui plus est, avait « mis ses crampons à l’envers ». Deux photos viennent appuyer la dénonciation avec en légende « notre Marseillais (…) équipé plage ».

Par où commencer ?
Par le plus stupéfiant peut-être avec cette photo d’un alpiniste dont le tort selon vous est de n’avoir pas réservé sa nuit au refuge et d’être mal équipé. Négligence ? Naïveté ? Prétention ? Quand bien même, un peu de bienveillance ne fait pas de mal par les temps qui courent. Ici, vous n’apportez rien d’autre que l’identification d’un citoyen ouvertement dénigré, pointé du doigt et jeté en pâture.

Comment est-ce encore possible en 2020,
qui plus est de la part d’un élu ?

Le rappel appuyé de son origine géographique et la formule familière « notre Marseillais » tente de créer une complicité. Populisme classique : regardez comme ils sont mauvais, vous verrez comme nous sommes bons. C’est aussi oublier un certain Gaston Rebuffat, pas manche en montagne et… Marseillais. Même en jouant votre jeu, ça ne tient pas.

Et ce titre pour finir : un titre aussi excessif qu’accusateur.
Mais monsieur Peillex, en quoi cet homme est-il une menace au point que « cette magnifique montagne » ait besoin d’en être protégée ? N’y a t-il pas plus grave menace sur le mont Blanc qu’un alpiniste mal équipé et sans réservation ?
Et quand bien même un homme se trompe, est-ce une raison pour lui jeter l’opprobre ? Un crampon mal mis fait-il d’un alpiniste un homme à clouer au pilori ? Est-ce davantage un délit que de brûler du kérosène pour des avions tournant autour du massif ?

Qu’il est loin l’idéal de solidarité
qui anime la montagne et les montagnards

Qu’il est loin l’esprit de pédagogie et d’apprentissage, pour débutants et prétendants de toutes origines. On connaissait votre aversion pour les alpinistes polonais ou russes. On découvre maintenant celle de la ville Phocéenne, ainsi que de la Bosnie puisque vous publiez la photo d’un autre « hurluberlu » en deuxième partie de communiqué. Qui demain pour détourner l’attention des électeurs ?

Monsieur le Maire, nous savons comment vous fonctionnez et vos incartades estivales ne nous étonnent plus. J’avoue même qu’elle me font parfois sourire tant elles sont excessives et donc insignifiantes.

Mais nous aimons cette montagne au moins autant que vous. Que nous soyions de passage ou résidents à Saint-Gervais-les-Bains notre avis compte, en tant que citoyens, quelles que soient nos origines géographiques, sociales ou nos niveaux techniques. Le mont Blanc ne vous appartient pas Monsieur Peillex. A la commune de Saint Gervais peut-être, encore que la notion de propriété communale est un autre débat. Mais à vous, non. Vous n’en êtes ni le juge ni l’arbitre.

Et cette fois Monsieur le maire, vous auriez dû vous abstenir. L’homme que vous avez placardé sur les murs, mêmes virtuels, de votre commune ne mérite pas l’humiliation publique. Personne ne la mérite.
La loi le dit. Elle appelle ça calomnie.

Le communiqué de la ville de Saint-Gervais-les-Bains, twitté par Jean-Marc Peillex le 1er septembre 2020. Dans sa version originale, le visage de l’alpiniste n’était pas masqué.