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Roche Faurio, voie normale hivernale

Les plus belles courses d’Alpine (et les moins pires)

En montant à Roche Faurio. ©Jocelyn Chavy

Il est des sommets belvédères, pourtant cimes élégantes, qui ont le bon goût de se mériter (car sinon, il y a trop de monde). Face à la Barre des Écrins, Roche Faurio répond à ces critères de choix. L’occasion de visiter le glacier Blanc ne se refuse pas : à pied ou à skis, cette ascension ne risque pas de décevoir, car son panorama n’a pas d’égal dans les Écrins. Et mérite sa place dans notre série Les plus belles courses d’Alpine (et les moins pires).

Roche Faurio est une île qui émerge du glacier Blanc, vaste royaume dont les dimensions sont tout à fait étonnantes, surtout quand vous avez le vent de face. Rêvons un peu, imaginons que les Alpes ne soient pas en train de crouler mais plutôt de vivre une nouvelle ère glaciaire. Voilà, c’est fait, vous voici sur le glacier Blanc, qui tel un fjord des Écrins est bordé de deux chapelets d’îles montagneuses. L’un s’étire de la Grande Sagne à Barre Noire. L’autre de Neige Cordier à Roche Faurio. Au milieu, ce lac immaculé du glacier Blanc, aussi plat que la main. Qui se mérite toutefois : le refuge du glacier Blanc permet une première étape courte, une nuit plus confortable sans doute à altitude moindre que le refuge des Écrins, perché tel un phare au-dessus des flots glacés à 3172 m. Évidemment dans le premier cas de figure, l’approche est longuette, tandis que ceux ayant plus ou moins dormi au second refuge voit l’accès forcément réduit. Une fois quitté le plancher du glacier Blanc, une pente aimable conduit à un truc sous le sommet. Une épaule, une antécime, ce que vous voulez mais pas ce que certains feignent de croire : le sommet, lui, est un poil plus haut.

 

Un soir au refuge du Glacier Blanc. ©Jocelyn Chavy

Le temple selon Christophe Moulin. Faces nord du Glacier Noir. ©Jocelyn Chavy

Au petit matin sur le glacier Blanc. ©Jocelyn Chavy

Are you experienced ? ©Jocelyn Chavy

Là, il faudrait sans doute écrire un autre article à propos de l’antécime (déjà fait ?) : car Roche Faurio, 3730 mètres, se redresse fortement sur ses derniers mètres. Tournez le dos à l’amas de séracs du Dôme de Neige des Écrins, et quittez la douceur ouatée du versant ensoleillé pour jouer au funambule sur une arête effilée. L’Oisans cher à Samivel apparaît dans toute sa splendeur, et le versant nord-ouest du Dôme des Écrins comme une version des enfers que vous devriez sans doute continuer à regarder de loin, comme une partie du cirque de Bonnepierre, et même si les premiers sont montés par là. Bref, le sommet de Roche Faurio n’est pas long mais pointu, avec une vue qui devrait passer l’envie aux curieux (dont je faisais partie, à l’imparfait) de se lancer dans feu le couloir de Tombe Murée, qui borde la face nord de Roche Faurio, dont les larges crevasses béent 700 mètres sous vos pieds. Qui a dit qu’il n’y a pas de gaz à Roche Faurio ? Il suffit de se pencher. Mais pas trop.

 

La Barre des Écrins. 4102 m. Un spectacle qui dure une matinée. ©Jocelyn Chavy

Panoramas depuis le sommet de Roche Faurio. ©Jocelyn Chavy

Astuces

  • au printemps, les skis font gagner un temps considérable. Portage jusqu’à 2300 mètres en ce moment (mai 2019). Attention aux crevasses.
  • une corde de 40 mètres suffit. Un rappel de 10m facilite la descente du pinacle au-dessus de l’épaule (bon béquet carré, sangle laissée en place)
  • deux possibilités pour gravir la pente médiane de Roche Faurio : par l’arête à gauche (facile, attention aux corniches) ou par la courte pente plus raide au centre (35/40°).
  • l’épaule à 3700 m est souvent adoptée par les skieurs de printemps, mais le sommet lui-même de Roche Faurio est plus haut, plus impressionnant que difficile. Traverser quelques mètres versant S puis monter droit par une grosse fissure (III+) jusqu’à un becquet carré. De là, suivre l’arête plutôt versant nord qui conduit à l’arête sommitale, horizontale, et au sommet.
  • les adeptes de traversée peuvent enchaîner, au départ de l’Alpe de Villar d’Arêne, le Pic de Neige Cordier (rappel depuis le col Emile Pic versant glacier Blanc), une 2ème nuit au refuge du glacier Blanc et Roche Faurio le lendemain. Retour versant Guisane en taxi ou passage le jour suivant (au départ du refuge du glacier Blanc) par les Agneaux via le col du Monêtier pour les plus gourmands.

Massif des Écrins, Roche Faurio, 3730 m, voie normale, versant sud-est, PD.

L’un des plus beaux belvédères des Écrins (sans doute le plus beau sur la Barre point culminant du massif) a été gravi pour la première fois le 21 juin 1873 par une équipe britannique emmenée par des guides suisses, dont Peter Knubel, le père de Joseph Knubel (du Grépon). Détail : ils ont fait la première de Roche Faurio en venant du versant Ouest (Bonnepierre). Et oui.

Accès 
Ailefroide, Pré de Madame Carle, refuge du Glacier Blanc ou refuge des Écrins. 

Topos 
On conseillera l’excellent topo Voies Normales et classiques des Écrins de Sébastien Constant, éd. Constant, qui propose dans ses pages un topo du tour du Glacier Blanc par ses sommets.

Matériel
Corde à simple, matériel de sécurité sur glacier.