fbpx

Open Space

La drôle de musique a débuté vers Saint-Gervais.
Les alpinistes à belle étoile n’y étaient pas les bienvenus. Ça, nous le savions. Mais ce n’était pas tout. Après l’interdiction de dormir, un permis – c’est le joli nom d’interdiction – de mont Blanc trottait dans quelques têtes à l’imagination dévorante. Comme une autorisation à vous déplacer sur Terre. La censure a horreur du vide, peut-être encore plus que de la liberté ; dès qu’elle repère une zone laissée outrageusement libre, elle la préempte et y pose ses grosses pattes. De cela, certains s’offusquent, d’autres applaudissent. C’est donc possible, on peut dégainer à l’envi les élans libertaires de l’icône Rébuffat, ces corps que l’on conduit là où les yeux ont regardé, et dresser dans le même temps des barrières à mouvement. Bref, sur ce versant du mont Blanc magnétique, espace public devenu celui d’un seul, il me semblait entendre « je suis chez moi. » L’illusion de propriété est effrayante, elle glace l’échine. Face à son expression, il est deux tentations, celle de forcer le passage et de surjouer la bravade libertaire, bivouaquer où beau nous semble, filer nu au mont Blanc s’il le faut ou celle de passer son chemin, surtout ne pas alimenter les frénésies médiatiques. Alors nous sommes partis voir ailleurs, là où l’on sait qu’interdire ne protège pas. Du côté de Gonella, s’ils ont la Ligue du Nord, ils ont aussi, et c’est heureux, le sens du refuge.
Le refrain est revenu. Comme tous les refrains.